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Gilles PEREFARRES, Labastide (65)

Gilles Perefarrès, la quarantaine, travaille sur son exploitation d’une trentaine d’hectares, dans les Hautes-Pyrénées à 650 mètres d’altitude dans le secteur des Baronnies, près de chez Francis Arné.

Sur son exploitation, il produit des bovins viande (veaux sous la mère), des ovins viande qui transhument en haute-montagne des Baronnies à 1921 mètres d’altitude.

Pour l’autoconsommation, il élève aussi des porcs, des volailles et fait du maraîchage.

Jusqu’en 2007, le seul moyen de traction est la traction animale sur la propriété. Les parcelles sont pentues et non mécanisables, et sont exploitées uniquement avec des paires de vaches, soit Auroises, Gasconnes ou Brunes.

En septembre 2007 Gilles Perefarrès loue des parcelles mécanisables et achète pour la première fois un tracteur d’occasion qui diminuera un peu l’utilisation de la paire de vaches. Cependant, l’exploitation d’origine en pente, reste entièrement travaillée avec les bovins.

Pendant l’été 2012, il perd une vache de travail à cause d’un corps étranger. La fille de la vache disparue est alors dressée.

Par malchance, pendant l’été 2013, la mort accidentelle de cette dernière amène au dressage d’une jeune bête de deux ans et demi dès l’hiver 2013/2014.

Les travaux effectués par les vaches sont:

  •    l’épandage du fumier
  •    l’émoussage
  •    les foins
  •    les petits labours
  •    l’entretien des cultures (pommes de terre, betteraves…)
  •    le débardage du bois 
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Gilles PEREFARRES  a répondu avec exemplarité au questionnaire de mise à jour du recensement des attelages bovins que nous menons depuis cette année. Nous l’en remercions chaleureusement.
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J’ai toujours des bovins dressés d’autant plus que je n’ai plus de tracteur depuis 4 ou 5 ans (complémentarité bovins/tracteurs de 2007 à 2018).       
 
J’ai une paire de vaches et une paire de bœufs. 
Les 2 paires sont attelées au joug double de nuque traditionnel des Pyrénées Centrales (« jouate »). Les bœufs étant assez gros, j’ai dû fabriquer un joug avec les précieux conseils de Lionel Rouanet, jougtier, qui habite près de chez moi.
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Les vaches sont assez bien dressées, utilisables.
Elles travaillent très régulièrement, minimum 1 fois par semaine, souvent plusieurs fois par semaine, assez fréquemment une fois par jour, en hiver en particulier.
Elles savent marcher « à la guide » (cordelette à l’oreille extérieure).
Elles ont 6 et 8 ans et avaient la même mère.
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Les bœufs sont en cours de dressage.
Ils marchent bien en paire.
Ils s’habituent progressivement à des travaux nécessitant de plus en plus de force et de savoir-faire. Ils paraissent assez prometteurs… Ils ont 5 ans.
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Les vaches sont Brunes d’Origine (Suisses traditionnelles) et les bœufs, gascons.
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J’ « exploite » environ 24 ha.
Les 10 que j’ai en propriété sont autour de la ferme et quasiment exclusivement cultivés en traction animale.
La propriété est à environ 650 m d’altitude, très pentue et difficilement mécanisable.
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Les vaches (et bientôt les bœufs) sont utilisés pour :
  • transporter les boules de foin du hangar au fenil de l’étable
  • « sortir » le fumier de l’étable/bergerie/chèvrerie
  • l’épandre au champ et dans les prés
  • passer l’émousseuse sur les prairies
  • préparer le champ (moins d’1 ha environ)
  • planter les pommes de terre 
  • tracer les sillons pour semer (betteraves fourragères, maïs/haricots tarbais, haricots, tous légumes…)
  • passer la houe entre les raies et butter
  • récolter les pommes de terre et les transporter
  • transporter les récoltes (betteraves…)
  • porter de l’eau pour arroser (canicule 2022)
  • débarder et transporter le bois de chauffage, les piquets de clôture…
  • faire les foins mais à « dose très homéopathique » (fauchage à la motofaucheuse)
 
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Le reste de la S.A.U (prairies naturelles), en fermage, est relativement éloigné de chez moi (4 ou 5 kms) et est entretenu (passage herse de prairie, foins…) par des voisins agriculteurs que je rémunère ou avec qui je fais des échanges.
 
Les vaches taries, sauf les 2 de la « paire », les brebis et les chèvres transhument à la belle saison dans les estives intercommunales.
Je suis agriculteur à titre principal.
Je produis des veaux sous la mère, des agneaux et des chevreaux que je vends principalement en vente directe.
Le reste de mon activité répond essentiellement aux besoins de l’autoconsommation familiale (viande, œufs, lait, légumes, fruits, bois de chauffage, de cuisson…).
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Je décline toute demande d’intervention à l’extérieur de ma ferme exception faite si un voisin me demandait un coup de main ponctuel (pour du débardage de bois par exemple…)
 
Je « joins » des vaches depuis le milieu des années 80 avec des anciens et seul depuis 1994.
J’ai 53 ans.
Mes parents étaient ruraux mais pas agriculteurs.
Mes grands-parents, »doubles-actifs ».
Je travaille seul sur une ferme « hors cadre familial ».
L’an dernier, j’ai accueilli 3 « stagiaires » locaux quelques semaines.
J’envisage de renouveler l’expérience (Woofing…) mais je n’ai pour l’heure aucune possibilité d’accueil…
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Formation à la traction bovine avec « 2 mains 4 cornes », Laurent Martin, les herbiers (85)

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2 Mains – 4 Cornes vous propose 4 formules de Formation à la pratique de la traction bovine.

Le dossier de présentation qui suit vous apportera tous les éléments pour comprendre les objectifs et l’organisation de chacune d’entre elles.

La 1 ère session de formation se déroulera du 02 au 06 octobre 2023 à CHANVERRIE (85130).

N’hésitez pas à me contacter pour plus de renseignements.

A très bientôt

Laurent

2 MAINS – 4 CORNES

MARTIN Laurent

06.32.93.79.57

2mains4cornes@gmail.com

4 Allée Paul Gauguin

85500 LES HERBIERS

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Vous pouvez télécharger la plaquette en cliquant ci-dessous:

fichier pdf Plaquette Formation Pdf

Rencontres de bouviers 18, 19, 20, 21 Mai 2023, les premières images, Soultzeren (68)

Serge Capmas, Gavaudun (47)

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Serge Capmas nous livre un petit texte sur son expérience avec les bovins de trait. Merci à lui.

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On peut dire que depuis tout petit je suis un fanatique des bovins et du matériel agricole ancien.

J’ai commencé à dresser une paire de génisses blondes d’Aquitaine il y a une quinzaine d’années, j’étais en activité, je n’ai pas consacré assez de temps pour elles.

Le temps passe, la retraite arrive et le rêve se réalise : en 2018, je trouve Moris bœuf Vosgien, 8 ans et dressé.

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Avec lui, je travaille la terre, il mène la jardinière pour déplacer les clôtures mobiles, promenades etc … C‘est un ange.

En novembre 2018, j’ai participé à la formation des bouviers à l’écomusée en Alsace avec Philippe Kuhlmann (qui avait dressé Moris à l’époque, comme quoi le monde est petit).

J’ai participé au rassemblement des bouviers sur le même site en 2019, une rencontre très enrichissante et conviviale, dont je remercie les organisateurs.

Je suis souvent sollicité pour participer à des animations: comice agricole, journée agribio 47, journée de l’élevage départementale et fêtes locales.

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Moris a tourné un film en l’honneur des 200 ans de ROSA BONHEUR, la première peintre animalière (Sabot n° 108).

Eté 2021, j’ai fait l’acquisition de deux génisses Vosgiennes Plume et Fleur, en gestation et débourrées.

Printemps 2022, elles ont mis bas (mâle et femelle Téléna). Téléna est en apprentissage.

Je dresse mes génisses en espérant qu’elles travaillent aussi bien que Moris.

Vous pouvez aussi lire un article du facebook de la chambre d’agriculture du Lot et Garonne en cliquant ici

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Les Bouviers d’Alsace 2022 à Soultzeren – la transmission d’abord par Cozette Griffin Kremer

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Corentin Huber, les bœufs et son invention, le joug de garrot et de tête, Soultzeren, Alsace, Photo Léonnie Biteau

D’ici et d’ailleurs, voici les mots clefs de toutes les réunions des « Bouviers « d’Alsace », depuis les débuts en 2005 à aujourd’hui, avec des participants venus cette fois de Belgique, de Suisse, d’Allemagne et des points cardinaux de France, du Massif Central à la Bretagne ou de la région parisienne, pour le week-end de l’Ascension du 26 au 29 mai, chez Philippe Kuhlmann à Soultzeren dans le Haut-Rhin. Lors de notre arrivée à quatre dans la voiture « Bretagne», des travaux sont déjà en cours au bord de la route menant à la ferme, Gesellenmatt, à la sortie du village, où Philippe utilise sa motofaucheuse manuelle et où toute une équipe est déjà en train d’andainer. Les bœufs aussi sont déjà au travail, puisqu’ils transportent les foins vers l’amont pour approvisionner les autres animaux parqués dans les champs près de la maison.

Ainsi, avant même d’arriver à destination, d’anciens et de nouveaux participants se rencontrent, renouant une fois de plus avec ce faisceau de contacts qui composent le réseau des bouviers : agriculteurs et éleveurs locaux spécialisés dans les Vosgiennes et éleveurs d’autres régions qui protègent et affinent leurs souches génétiques à double usage (viande et lait), comme pour la Ferrandaise. Philippe semble être le seul éleveur de France à avoir conservé son cheptel destiné à la triple utilisation (viande-lait-énergie).

Philippe et ses voisins ont mené le plus gros de leurs troupeaux vers les hauts pâturages une semaine avant la réunion, laissant seulement quelques vaches et bœufs dans les champs près de la maison, en amont et en aval de la basse-cour avec sa collection de lapins, de poulets, et d’oies. Ces dernières s’appliquent à surveiller si attentivement la réunion, que chacun finit par être sur ses gardes lors de ses déplacements…

Philippe a déjà disposé sous le balcon du chalet une partie des jougs et des harnais qui seront exposés dans la salle communale du village de Soultzeren pendant le week-end. Nous sommes encore à la veille du début de la réunion officielle, et profitons de ce moment de tranquillité pour discuter avec les voisins et les amis de Philippe. Certains des participants viennent « étiquetés » pour l’occasion – avec des t-shirts ou des gilets indiquant leurs passions, que ce soit « Alsace », « Chevaux de trait belges », « Ferrandaise », « Concours national de débardage au cheval », « Ready to Plough » (en anglais) ou simplement « Bouviers » comme le groupe de la Vendée qui arrivera le lendemain, parce qu’ils faisaient escale le jeudi chez Michel Nioulou, le maître du blog des bouviers, pour un stage intensif de fabrication de jougs.

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Michel Nioulou avec une partie de l’équipe vendéenne, lors du stage de jougtier, Photo Léonnie Biteau

Après la traite matinale à la main dans son étable, Philippe accueille les premiers participants de la journée du jeudi. Tous se présentent et expliquent les raisons très diverses de leur intérêt pour les bovins de travail. Nombre d’entre eux viennent, comme la vétérinaire suisse, pour rencontrer Pauline Ernewein, l’ostéopathe animalière. Grande habituée des chevaux, Pauline relève avec fougue le défi d’aborder les bovins. Elle commence donc à démontrer le savoir-faire des ostéopathes professionnels pour traiter les animaux, ici les bovins, attentive à tout signe d’inconfort ressenti par l’animal, comme de ne pas bien équilibrer son rythme de marche entre le côté gauche et le côté droit. Un tel bœuf est pour ainsi dire « perdu dans ses pattes » et il faut savoir où le masser pour corriger ce déséquilibre.

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Pauline Ernewein, ostéopathe animalière, Photo Léonnie Biteau

Pauline explique aussi quelques-unes des limites légales de la profession de l’ostéopathie animale – un point toujours important dans ces métiers de soin – puis nous montre des pratiques de massage ou des points de pression, correspondant à chaque problème. Tout d’abord, comment passer la main près de la colonne vertébrale pour détecter où se situent des points de chaleur. Elle encourage ensuite plusieurs d’entre nous à essayer, et cela va confirmer que, en général, même un novice total peut trouver les mêmes points trop « chauds » que l’experte. Cette séance étant spécifiquement ouverte aux savoirs des autres, Philippe, Joël Blanc et Guy Chautard nous montrent leur propres « tours ». Par exemple, Guy pratique une technique de massage consistant à soulever la peau du dos. Plusieurs séances ultérieures à la ferme ou au village du Valtin laissent le temps à d’autres encore d’« étudier » brièvement avec Pauline. Quelques membres un peu plus âgés de l’assemblée souffrant d’arthrite, les séances de massage se sont même étendues à un genou humain, ce que le propriétaire du dit genou a qualifié de réel succès, mais c’est une autre histoire… Ce sont surtout les liens entre générations qui sont déterminants, comme l’a dit Guy à un moment donné – « j’aime donner ce que je sais, je ne sais pas tout, j’ai encore beaucoup à apprendre ». Le réseau de bouviers doit réussir à assurer ce partage des savoirs. Citons l’écho venant d’une des jeunes bouvières – « je me rends compte qu’on ne sait pas faire grand-chose et on sent que le monde va changer ».

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Guy Chautard lève la peau, Photo C. Griffin-Kremer

Après le déjeuner, version auberge espagnole, nous montons à l’étable pour laisser place à ceux qui attellent les bœufs – dont un Vosgien rouge et blanc (ces derniers représentant environ 5% des naissances). Philippe insiste toujours sur le fait de ne jamais les monter ou descendre sans faire quelque chose d’utile, par exemple, ramasser une bûche supplémentaire laissée au bord du chemin. Même un petit aparté comme celui-là réunit tout le monde pour s’essayer à porter une bûche de la meilleure façon, celle-ci étant à peu près à la limite du poids qu’une personne seule et de taille moyenne, femme ou homme, peut contrôler, en l’équilibrant sur la hanche. Cet exercice nous procure l’occasion de bien rire ensemble du côté comique des premiers essais, mais tous ceux qui s’y aventurent réussissent à bien faire en peu de temps. Concernant une tâche fréquente de débardage, Philippe nous montre comment ajuster la chaîne de tirage, positionner la paire de bœufs attelés, puis les guider pour tirer la chaîne vers l’avant afin de pousser une bûche entre deux pierres posées dans l’allée de la ferme. Il s’agit d’une répétition en vue de la démonstration publique prévue le samedi dans le village du Valtin, de l’autre côté du col de la Schlucht. Les deux bœufs de Philippe sont tellement habitués à faire cette manoeuvre qu’ils font tout le « tour » en moins de deux : sortir une bûche du tas situé près de leur pâturage, la pousser entre les deux pierres, puis la replacer de nouveau avec les autres.

C’est alors que Gilles Péquignot et Danyèle Besserer du groupe de musique traditionnelle « Au gré des vents » arrivent pour leur première intervention durant ces quatre journées. Gilles est un voisin de Philippe et ami depuis longtemps de Michel Nioulou, au point qu’il s’est décidé pendant le confinement de se mettre aussi à la taille des jougs (voir Sabots N°108 mai-juin 2022). Danyèle et Gilles ajoutent chaque jour à l’ambiance festive et amicale de la rencontre – ​​à la ferme à Soultzeren, au village du Valtin le samedi et à Soultzeren le dimanche. La convivialité étant déjà bien en place, nous recommençons nos échanges sur les enjeux de la traction bovine, sur l’avenir des agricultures à petite échelle à travers l’Europe et au-delà, et surtout sur le sujet crucial de la transmission des savoirs et sur la manière de construire une image positive de la traction animale. Comme le bouvier alsacien André Kammerer, qui à sa retraite s’est lancé le défi de ne plus conduire des trains, mais des bœufs, et qui a transmis cette passion à son petit-fils Corentin. Les conversations entre générations fusent et, à la fin, Guy Chautard, l’éleveur de Ferrandaises, passe à Corentin son béret avec le blason de la race en symbole de la transmission.

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Corentin Huber avec le béret de Guy Chautard, symbole de la transmission, Photo Léonnie Biteau

Alors que nous étions autour de la table, Guy nous a rappelé la disparition au mois de mai de Laurent Avon, autrefois à l’IDELE (Institut de l’Élevage), un des grands défenseurs de l’élevage bovin, des races à petits effectifs, de la diversité génétique et de la traction animale. Comme en écho à sa fidélité à la tâche et à sa passion, la mort l’a fauché alors qu’il était en train de visiter un troupeau de Villard-de-Lans. Nous lui devons, tout comme au soutien de son chef de l’époque à l’Institut, Jean-Maurice Duplan, les nombreux recensements de troupeaux ainsi que celui des bouviers disposant encore d’attelages. Pour Laurent, l’un des points forts des diverses fêtes de ces dernières années était de voir autant de bouviers réunis à la Fête de la Vache Nantaise au Dresny en 2018, où il a rencontré Philippe Kuhlmann, tous deux entourés des labours faits avec des bœufs – une attelée de cinq paires ! – des chevaux et des mules.

Au fur et à mesure qu’avance la journée de vendredi, nous sommes rejoints par d’autres participants, dont Claus Kropp, Président de l’AIMA (Association Internationale des Musées Agricoles), venu de la ferme expérimentale d’archéologie de Lauresham au sein de l’Abbaye de Lorsch dans le Land de Hesse en Allemagne, un site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Claus compte parmi les nombreux participants à avoir suivi un des stages de Philippe à l’Ecomusée d’Alsace, mais il vient cette fois « armé » d’un dynamomètre pour une expérience technique…

Un aspect frappant de la ferme de Gesellenmatt, c’est qu’il faut beaucoup chercher pour trouver ne serait-ce qu’un tout petit espace plat. C’est une vraie ferme de hautes terres. Philippe a donc délimité un minuscule champ près de son étable « éphémère », inventée à l’occasion du concours à l’Ecomusée d’Alsace sur les constructions portatives en 2017, et utilisé aujourd’hui à côté de l’étable en dur. Ce futur champ de pommes de terre nous a donc servi de site d’expérimentation de labours à l’aide de divers engins, le tout avec l’aide du dynamomètre apporté par Claus. Tous s’accordent à dire que la terre est bien trop sèche pour pouvoir pénétrer le gazon et labourer.

Le cinéaste Dominique Garing installe sa caméra pour un premier essai de tournage de ce genre de travail technique, Claus attache le dynamomètre et Batiste Rossius-Gagnon prend les commandes de l’attelage pour le premier essai. Le petit escarpement à côté du champ ajoute du piquant à cette démonstration et bon nombre de participants veulent s’y essayer. Philippe tient particulièrement à encourager les jeunes à se lancer, comme son neveu qui l’accompagne déjà dans l’élaboration de ses projets. Le fait qu’il y ait un beau contingent de jeunes, femmes et hommes, parfois même accompagnés par leurs parents, est d’ailleurs un atout pour la réunion. Pauline, l’ostéopathe, compte elle aussi parfaire son expérience des bœufs et apprendre à les mener lors du labourage. Parmi les outils de labour utilisés, Bertrand Tournaire nous présente une Kassine à disques billonneurs de PROMMATA, avec réglage adapté à la largeur de la raie envisagée, cette fois tractée par un seul bœuf sous un collier. Nous avons également assisté à un moment ludique au début de l’effort, lorsque l’outil a eu un pneu « crevé » (plutôt, tombé). Il est rapidement remis en marche et Claus lui attache le dynamomètre pour assurer une analyse comparative des divers instruments – il a promis de nous en remettre un rapport complet. Une fois tous les novices passés à l’exercice, Joël Blanc, riche de l’expérience de toute une vie, termine la tâche, et un nouveau champ de pommes de terre est planté.

Mais ce n’est pas la fin de la journée, loin de là, puisque d’autres arrivent encore, parmi lesquels Anne Wiltafsky, Allemande et experte en comportement bovin. Elle fait une introduction informelle sur la manière d’explorer les points « timides » d’un tout jeune animal, à l’aide de l’étrille. Chaque moment passé ensemble le vendredi fournit ainsi l’occasion de s’entraîner pour le programme du lendemain au village du Valtin. Tôt le matin à Soultzeren, Daniel Viry, spécialiste de débardage et habitué des fenaisons à l’ancienne, a fauché l’herbe sur le coteau près de la pâture des bœufs pour préparer sa participation à plus grande échelle au Valtin. Mais tout le monde attend aussi un autre « événement »  qui vient à point nommé, le Manuel d’attelage bovin – comment choisir, soigner et débourrer de Philippe, dont nous avons vu la tout première version en 2019. En effet, les cartons contenant les exemplaires de la seconde version du livre sont arrivés juste avant les participants.

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Philippe Kuhlmann Manuel d’attelage bovin scan couverture

Le ciel nous a souri le samedi au Valtin, petite commune de 89 habitants dans le canton de Gérardmer, mais fière d’être la plus haute du Massif vosgien et située dans le Parc Naturel des Ballons des Vosges. Le site est magnifique, tout près du col de la Schlucht, les maisons et l’église « habillées » de bardeaux de bois, portant souvent des dessins subtils, typiques de l’architecture vernaculaire régionale. Le Valtin étant proche de la frontière, il y a bon nombre de touristes allemands. La commune a prévu leur accueil, puisque chaque intervention en français ou en allemand est traduite par l’animateur de la fête. Anne, la spécialiste du comportement bovin, fascine le public, comme d’habitude, avec son « apprivoisement » si rapide de jeunes animaux. Les enfants affluent pour les caresser, même pour monter sur le dos du plus coopératif des bêtes et rester le temps d’un gros câlin. Anne apprend aussi aux enfants comment mener un jeune bovin, puis le faire tourner à gauche ou à droite. Philippe l’accompagne au micro, expliquant que la méthode d’Anne joue sur la sécrétion de l’ocytocine – appelée « l’hormone de l’amour » et produite par l’hypothalamus – qui calme à la fois un jeune bœuf et la personne qui le caresse. Voilà une des raisons pour lesquelles des thérapies de toutes sortes peuvent s’appuyer sur le contact avisé avec les animaux. Dans le travail, ce calme est le signe de l’alliance du respect et de la confiance.

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Anne Wiltafsky rapproche l’enfant et le jeune bœuf, Photo Léonnie Biteau

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Doucement, Photo C. Griffin-Kremer 

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Enfin, le gros câlin tout seul, Photo Christine Arbeit 

NB Les parents du garçon nous ont autorisé à publier ces photos

Ce contact si paisible entre les enfants et les toutes jeunes bêtes représente un événement tout en douceur et un contraste avec le travail de Philippe et de ses partenaires lors des démonstrations plus rapides, plus risquées et spectaculaires : tirer des bûches de très haut sur le flanc de montagne jusqu’au fond de la vallée, en s’assurant que le bœuf est bien en avance sur la bûche, pour que celle-ci ne puisse pas rouler et entraîner l’animal. Tâche délicate, évidemment, pour la sécurité de tous, mais réussie, et à ce propos, le public prend parfaitement au sérieux les avertissements de Philippe et de l’animateur.

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Le terrain de débardage du Valtin et la fête, Photo Léonnie Biteau

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Fanny Boisson au débardage, Photo Léonnie Biteau

Le Valtin étant tout proche de musées consacrés aux métiers du bois, du débardage ou du schlittage, Philippe porte donc une schlitte jusqu’en haut de la pente, tandis que son équipe scie le bois, ramasse les branches et charge le traîneau que Philippe descend au pas de course, seule activité de travail effectuée sans les bœufs.

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 Philippe portant la schlitte, Photo : C. Griffin-Kremer

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Photo Léonnie Biteau

En bas, un public nombreux est venu pour regarder les bouviers, mais aussi pour se détendre en dansant sur la musique de Gilles et de Danyèle. Philippe n’hésite pas à chanter en français et en alsacien – et même une chanson consacrée aux « Bovins d’abord. Tout le monde profite des stands proposés par les bénévoles de la commune où il y a de tout, du crémant d’Alsace aux hotdogs façon valtinoise. Beaucoup s’essaient à un concours de coupe de petites billes à la scie passe-partout. À la fin de la journée, il y effectivement un amas impressionnant de disques en bois, mais il règne une certaine discrétion sur les gagnants, ce qui nous amène à conclure que tout le monde était un champion.

Le groupe de jeunes bouviers vendéens prouve qu’ils aiment chanter, mais ils prennent également le micro pour rendre compte de leur stage chez Michel Nioulou, pilote du blog « Attelages Bovins Aujourd’hui » et jougtier expérimenté. Très naturellement, le ludique se marie avec le pédagogique. Il y a des activités comme la démonstration de fauchage et d’andainage traditionnels sur la pente – une association de travaux intimement liés avec la traction bovine. Christine Arbeit, pilote du groupe Facebook des bouviers, informe régulièrement tout le réseau français des faucheurs sur les événements associés à l’attelage de bœufs, pour encourager tout le réseau de métiers essentiel à l’utilisation de la traction animale.

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Batiste à l’andainage au rateau-faneur, Photo Léonnie Biteau

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Andainage au râteau au Valtin, Photo Léonnie Biteau

Fidèle participant de chaque réunion en Alsace, Jean-Claude Mann, le bourrelier, apporte toute sa panoplie pour la fête, des sonnailles à vaches encore utilisées en transhumance aux exemples de harnachement en cuir qu’il fabrique. Il encourage vivement les enfants et les autres visiteurs à essayer toutes les sonnailles – une belle publicité qui n’a pas besoin de sono… À ce propos, un fermier des hautes terres et expert collectionneur de sonnailles explique que ces cloches étaient surtout destinées à protéger les animaux en effrayant les vipères et permettaient aux vachers de les retrouver, lorsque la brume tombait. Il cultive ce passe-temps avec passion et dévouement, en constituant des archives aussi complètes que possible sur chaque pièce, comme celle datée de 1925 qu’il nous a montrée. À l’époque, on ne rivalisait pas à qui avait le plus grand tracteur. C’était à celui qui avait les plus belles vaches avec les plus belles cloches. En toute logique, il s’intéresse également au vocabulaire laitier de l’alsacien, car chacun sait combien il est urgent de sauvegarder les volets traditionnels de la langue.

Les événements du samedi au Valtin sont désormais disponibles, grâce à Vosges TV dans son émission du 2 juin intitulée « Fort comme un bœuf » où l’on parle surtout de la jeunesse. En effet, tout le monde remarque l’intérêt des jeunes et de leurs parents pour la traction animale, non comme un retour au passé, mais comme une ouverture vers le futur et une autre façon d’aborder l’agriculture et l’élevage.

En accueillant cette fête des bouviers, la commune du Valtin a su relier de nombreux éléments de son propre passé avec la passion du travail des bouviers.

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Photo Léonnie Biteau

Un soupçon de pluie nous accompagne aux premières heures du dimanche (ou comme le dit un participant, «  il pleut mouillé »), mais nous sommes bien à l’abri pour la synthèse finale. Comme tout au long du programme, on fait valoir le principe de souplesse, ne serait-ce que pour s’adapter aux souhaits exprimés par les divers participants. Par exemple, les bouviers vendéens auraient tellement voulu s’essayer à la construction d’une charrette chez Michel Nioulou, mais le temps a manqué. Chez Philippe le dimanche matin, ils tombent sur un châssis de chariot et coupent le bois pour fabriquer presque instantanément une charrette. Effectivement, la veille pendant la nuit, ceux qui dormaient à la ferme ont bien remarqué un bruit un peu mystérieux…

La pluie a décidé que ce n’était pas le moment d’insister, et nous pouvons assister à la toute première présentation d’une création de Corentin Huber. C’est parfaitement dans l’esprit d’inventivité de Philippe, qui construit ou modifie des outils pour ses propres besoins, comme les coussinets frontaux attachés directement au joug, ou son ramé, le chariot élévateur-pousseur, actionné par une paire de bœufs qui pivotent pour faire marcher l’engin – le tirant ou le poussant. C’est parfait pour convoyer des grumes ou des branchages, des bottes de foin et autres. À plusieurs reprises, Philippe nous rend attentifs à des détails. Ce sont précisément ces détails qui comptent pour la sécurité des meneurs et le bien-être des animaux. Par exemple, trouver des courroies pour les jougs de têtes qui ne gênent pas les bœufs. Pour un attelage « éducatif » à trois bêtes, composé de deux jeunes derrière un bœuf expérimenté, comment sécuriser la chaîne qui les relie pour ne pas accrocher les cornes ni toucher l’oreille ? En effet, une chaîne laissée trop lâche pourrait prendre la bête sous la mâchoire. Ajoutons que le meneur lui-même doit faire attention. S’il met les pieds des deux côtés de la chaîne, et que les bêtes démarrent rapidement, il peut avoir une surprise douloureuse…

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Photo Léonnie Biteau

De son côté, Corentin est parti sur une tout autre piste en se laissant inspirer par une observation attentive des avantages et des inconvénients du joug de garrot et du joug de tête. Donc, il invente une transition du premier au deuxième. Or, les bœufs n’ont pas l’habitude du joug de garrot et passent par quelques moments d’hésitation. Pourtant, ils réagissent rapidement et bien à la nouveauté, surtout parce qu’ils ont l’habitude de travailler ensemble, et que Corentin est un meneur expérimenté. Il lui suffit de leur mettre le joug de garrot, de dérouler le coussin feutré sur le front, d’attacher la courroie-ceinture à boucle sur le front, d’enlever la goupille pour détacher les arcs et, voilà, qu’un joug en devient un autre !

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Le joug de garrot va passer à un joug de tête, Photo Christine Arbeit

La plupart des participants devant se mettre en route pour rentrer chez eux, le dimanche au village voisin de Soultzeren passe trop vite. Mais la salle communale propose une exposition de matériel de traction bovine et nous goûtons tout de même à un bon moment de convivialité autour du repas de midi. Ensuite, Daniel Viry peut faire travailler ses deux bœufs avec le joug « innovation » de Corentin, et Philippe continue l’animation avec une démonstration de chargement de foin. Il nous reste un témoignage important : la vidéo faite par le cinéaste Dominique Garing restitue admirablement les échanges bien trop riches pour les décrire tous ici et contient des séquences très détaillées sur les aspects techniques, sans oublier les moments de détente et d’humour partagés.

Au moment du départ, nous pensons au mot d’ordre « les bœufs d’abord » qui n’exclut en rien toute la diversité de l’énergie animale, mais rappelle – comme la chanson du même nom – que l’art rupestre de la préhistoire européenne montre les bovins comme les premiers partenaires de travail des champs de l’être humain. L’enthousiasme pour la transmission dont la réunion à Soultzeren a fourni la preuve, nous permet de tourner nos regards résolument vers l’avenir et de nous inspirer du mot d’un des participants : « Le passé instruit l’avenir, c’est l’avenir qui est important. »

Cozette Griffin-Kremer

 

Notes

Gilles Péquignot « On se construit des rencontres que l’on fait » sur la taille des jougs, Sabots N°108 mai-juin 2022, pp. 56-57, et sur le blog Attelages Bovins Aujourd’hui Cliquez ici pour voir 

Hommage à Laurent Avon par Pierre-Louis Gastinel, ancien chef du Département Génétique de l’Institut de l’Élevage sur site Internet de « La Chèvre des Pyrénées » Cliquez ici pour voir 

Pauline Ernewein, ostéopathe animalière, Cliquez ici pour voir 

Philippe Kuhlmann, Manuel d’attelage bovin – comment choisir, soigner et débourrer, 2022, ISBN 979 10 699 9483 6, illustrations noir-et-blanc et couleurs, 222 pages. Cliquez ici pour voir

Vosges TV émission du 2 juin, « Fort comme un bœuf »  Cliquez ici pour voir

Jean-Léo Dugast. Fête de la Vache Nantaise, Sabots N°87, 22-31.

« La traversée des bouviers », voyage estival chez des bouviers français, Corentin Huber (67)

"La traversée des bouviers"

A presque une année de notre première rencontre, au détour d’une soirée, il aura suffit d’un simple message lancé sur le ton de la rigolade pour que nous nous lancions le défi de partir à la rencontre des bouviers à travers la France. C’est grâce à cela que, le mois d’août suivant, nous avons commencé notre incroyable aventure « La traversée des bouviers ».

            Le but a été de partir de la Vendée pour rejoindre l’Alsace et la Lorraine, en sachant que les détours risquaient d’être plutôt nombreux.

C’est donc un an après notre rencontre, jour pour jour, que nous nous sommes retrouvés près de Guérande pour partir, deux jours plus tard, vivre une expérience unique en son genre, avec comme règle d’or pour le voyage : “Le programme c’est qu’y a pas d’programme” . On avait juste des adresses et des jours de passage. Le reste s’est décidé au jour le jour, en fonction de nos envies et des opportunités.

 

Voici donc le petit journal de bord tenu par nos soins :

 

–       Mardi 9 Août : Un grand voyage

“Hoppla sech gut*, pour le grand départ”.  Direction le Puy du Fou pour y retrouver plusieurs amis bouviers de l’académie des bouviers du Puy du Fou.

 *C’est bon

            Après une visite guidée de ce site aussi surprenant que magique, nous avons assisté à un enchaînement de spectacles plus beaux les uns que les autres. Une seule et unique réponse nous venait à la fin de chaque spectacle : “WWWWOOOOUUUAAAHOUUU!”

            Non, non, on ne rigole pas, ça a vraiment été la réaction de l’un de nous deux qui n’a eu que ce mot à la bouche tout au long de la journée.

            Nous avons clôturé cette première journée avec l’ensemble des bouviers du Puy autour d’un repas bien arrosé et riche de partage. La nuit fut donc courte pour certains, qui avaient reçu comme un coup de massue sur la tête. (On mettra évidemment tout cela sur le dos de la fatigue)

 

–       Mercredi 10 août : La visite vue de l’extérieur

Après un réveil compliqué pour certains … nous avons pu découvrir à quel point le Puy est immense. L’espace foulé par les spectateurs n’est rien comparé à la superficie totale du parc. Des prairies immenses entourent le site, sans compter les coulisses, les divers bâtiments et les hôtels. Nous avons profité de cette journée pour rencontrer les protagonistes au cœur de notre projet : Les bœufs du Puy-Du-Fou. Ces derniers sont grands et d’une couleur proche du blanc “pour être un maximum visibles lors des spectacles nocturnes”.

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            Pour ce qui est du dressage dressage, les bœufs sont achetés généralement par paires en cours d’apprentissage ou déjà dressés pour réduire le travail des académiciens et aller directement à l’essentiel : obtenir des bœufs prêts pour les spectacles ! Participer aux spectacles leur demande un grand travail de contrôle et un sang-froid incroyable en toute circonstance pour rester stoïques malgré l’agitation, le bruit, les simulations d’explosions, les jeux de lumière… En aucun cas cela ne facilite l’apprentissage, les seuls avantages sont d’avoir des bœufs déjà grands et donc plus rapidement disponibles au travail.

            Pour ce qui est du menage, cela reste standard, comme nous pourrons en voir par la suite lors de notre périple : une personne à l’avant de leurs têtes, et une autre à l’arrière lors des spectacles.

 

            La journée se termine encore rapidement, et quoi de mieux qu’un labyrinthe de maïs géant pour finir ?

 

–       Jeudi 11 août : Premier changement d’environnement

“Direction l’Ecosse, et on pensait pas que c’était si proche de la Vendée”!!

            Comme nous sommes plutôt chanceux, on va dire que l’Ecosse est venue à nous en Vendée. Nous y avons rencontré Vigoureux et Caramel, deux supers Highlands.

 

            Ces deux highlands sont en cours de dressage. Ce qui est intéressant à voir dans leur fonctionnement est plutôt simple à constater mais moins facile à appliquer. Leur corde, qui nous permet de les tenir, et ne sert qu’en cas de danger lors de promenades où nous nous retrouvons à l’avant. Nous avons donc appris à les mener et marcher avec eux sans les tenir, simplement grâce à un bâton que nous n’utilisons que pour avoir un léger contact et demander aux boeufs d’avancer et les cadrer. C’est plus un outils préventif qu’autre chose, car nous l’utilisons de manière vraiment restreinte, le but étant d’avoir un animal marchant de manière coopérative et calme, et non sous la contrainte.

Une seule personne suffit pour mener la paire sans joug. Autant vous dire que les manœuvres sont plutôt intéressantes et compliquées lorsque Caramel décide de n’en faire qu’à sa tête.

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Dans la journée Pauline avouera : «C’est dur d’être à l’aise avec d’aussi grandes cornes derrière soi »

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On va pas se mentir, ce jour-là, il a fait chaud. Donc quoi de mieux qu’une balade dans le marais Poitevin pour se rafraîchir. Et là encore, pour changer, nous avons vu quelques bovins en train de se rafraîchir au bord de l’eau.

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Cela nous a permis de clôturer la journée par un petit restaurant sympathique avec des spécialités Vendéennes.

–       Vendredi 12 : Le retour du grand Wwoouuuuaaahouuu

« Ohhh yeeeeh c’est quand même impressionnant le Puy du Fou »

Nous sommes retournés en Écosse. Ce matin, nous nous sommes levés plus tôt que d’habitude pour aller nous balader à la fraîche. Nous avons pu tester la balade en solo sans corde, de nouveau sur une longue distance. Cela nous a permis de voir comment se déplacent ces bovins, dans les forêts, avec des grandes cornes, en montée et en descente, dans les virages, entre les arbres, proches de clôtures… et croyez-nous, Vigoureux et Caramel sont loin d’être aussi maladroits qu’on pourrait le penser au vu de la taille de leurs cornes. Quand la chaleur est arrivée, après deux heures de marche, nous sommes retournés à l’étable.

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Après une pause à midi, nous y sommes retournés pour essayer le joug vendéen. Julien, qui est à l’académie du Puy du Fou, nous a montré comment lier les bovins à la méthode Vendéenne.

Nous avons enchaîné sur les prototypes de joug de l’un de nos deux aventuriers. Cela a permis à Léonnie, Pauline et Julien de voir la différence de technique entre la plaine et la montagne. En Vendée, où le terrain est principalement plat, les cornes sont stabilisées et bien fixes sur le joug alors que dans l’Est et dans les pays montagneux, nous laissons plus de jeu au niveau des cornes, ce qui permet de limiter les contraintes sur la nuque du bovin sur des terrains escarpés… Mais là n’est pas le sujet de cet article.

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La journée se termine finalement sur la Cinéscénie, et là encore, un seul mot à dire « Wwoouuuuaaahouuu » c’est si impressionnant de voir tout ce monde bouger, toutes ces mises en scène, le décor qui change au fur et à mesure de l’histoire. On va pas mentir, ça nous a mis des étoiles dans les yeux et nous nous sommes vite rendu compte qu’il nous faudrait bien plus qu’un spectacle pour assister à toutes les mises en scènes se déroulant lors d’une Cinéscénie.

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Le spectacle se termine finalement, et nous retrouvons la majorité des bouviers du Puy autour d’un dernier verre (de jus de fruit cette fois, oui ça nous arrive parfois !)

 

C’est sur ces dernières notes que nous avons clôturé cette étape vendéenne riche en rire et aventures.

 

–       Samedi 13 : C’est les Deux-Sèvres ou le Sahara?

« Vingt dieux, c’est pas aujourd’hui qu’on va faire une raclette »

 

Eh oui, une chaleur étouffante nous a pris de court. Heureusement, les bœufs Vosgiens sont résistants ! On vous présente Max et Gaston, deux bœufs Vosgiens encore en cours de dressage. La paire est magnifique, et ces deux mastodontes sont complémentaires.

Cette rencontre a lieu au Musée du Tumulus de Bougon, lors d’une journée de reconstitution sur un site archéologique.

La journée a été rythmée par beaucoup de discussions et d’échanges sur la pratique de la traction bovine avec Jo Durand, Laurent Martin et notre chère Léonie qui a souhaité réaliser un petit bout de l’aventure avec nous. Nous sommes arrivés à la conclusion qu’aujourd’hui presque tous les bovins utilisés (je cite) « manquent de précision ». À vrai dire, nous en sommes convaincus, la barre est suffisante pour assurer du spectacle, mais en aucun cas elle n’est assez haute pour faire de la précision de la précision avec les bovins.

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Le soir, après un petit piquenique, nous avons tenté de dormir à la belle étoile. Cela n’a pas été une grande réussite car au bout de quelques heures, l’orage est venu nous taquiner. Heureusement, Pauline a pu se réfugier sous la tente de Léonnie et Corentin dans notre cher Kangoo.

 

–       Dimanche 14 : Un nouvel arrivant dans notre séjour

« Papy nous a rejoints pour nous faire un petit schmoutz *»

 *Bisous

Vous vous demandez peut-être qui est papy ? Ce n’est personne d’autre qu’André Kammerer, le grand-père et premier partenaire d’aventure de Corentin. Il a fait le choix de quitter l’Alsace quelques jours pour nous rejoindre sur le parcours pour une étape pleine de remise en question et d’échange.

Toujours dans les Deux-Sèvres, il nous a retrouvés pour suivre quelques jours notre périple avec nous. Ce jour-là, il a fait moins chaud et nous avons donc pu voir un peu plus de monde sur le site afin de réaliser et assister à des démonstrations de battage des céréales grâce aux bœufs. Nous avons pu découvrir le fonctionnement d’un tribulum et de quelques autres inventions historiques, après avoir fait un petit essai longues rênes et en paire.

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Par la suite, nous avons laissé Laurent Martin, et nous sommes partis avec Jo et André pour la Creuse.

–       Lundi 15 : La Creuse c’est dépaysant

« On a l’impression d’être seul et perdu mais tout le monde se connaît, c’est très accueillant »

Il faut dire que Jo est une personne très familière pour Corentin et son papy. Cela fait depuis 2009 que notre pèlerin connaît Jo et son grand-père l’avait rencontré bien avant.

Après un ramassage de haricots, nous avons échangé sur l’agriculture actuelle, et sur le fait que les bovins sont de plus en plus sensibles et fragiles, donc moins aptes à faire de la traction animale. Cet échange nous a pris presque toute la journée, nous avons découvert l’endroit où Jo vit en presque totale autonomie.

Par la suite, nous sommes allés voir les quelques bovins qu’il possède.

Cette rencontre nous a permis d’échanger les connaissance, mais dans un échange, le principe est de repartir avec avec, comme dans tout échange, un partage des savoirs. Et justement, ces derniers temps, Jo rencontrait un problème avec sa vache favorite qui marchait mal et refusait souvent le travail.

Pauline, en a donc profité pour nous faire un cours rapide sur les séances d’ostéopathie, autour des impacts du travail, du matériel, du milieu de vie et des irrégularités locomotrices sur l’animal. Tout le monde a donc pu assister et participer à un petit atelier permettant de commencer à développer son ressenti afin de localiser des zones douloureuses, chercher, aider et soulager l’animal. C’est loin d’un diplôme mais ça peut toujours être utile.

La journée s’est terminée vers 1h du matin après avoir monté une tente dans le noir sous la pluie. Bref… on est définitivement toujours aussi bien organisés!!

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–       Mardi 16 : Déjà une semaine que nous sommes partis

« La Creuse c’est humide même sans pluie »

Aujourd’hui, nous avons eu un cours sur les longues rênes, la source principale de travail de Jo, Pascal (son fils) et Mélanie. Le travail aux longues rênes est très intéressant et totalement opposé à celui consistant à tenir l’animal au licol par devant. Il faut apprendre à l’animal à faire son propre chemin et ne pas nous suivre.

Ce voyage, nous permet vraiment de découvrir énormément de choses car le travail aux longues rênes sur des bovins est très rare contrairement au monde équin…

Pascal et Mélanie nous ont raconté leurs histoires et la raison pour laquelle ils sont devenus autonomes en utilisant le travail avec des bovins. Cela nous a permis d’avoir un regard différent sur la société actuelle et le monde dans lequel nous vivons. A noter que la cuisine de Mélanie était excellente !!

 

–       Mercredi 17 : L’heure est à la pratique

« Maintenant ta schness* et on pratique »

C’est bien beau de parler, mais la pratique c’est encore mieux pour comprendre. Avec l’une des vaches appelée Patuki, nous avons fait un petit peu de travail de maraîchage. Pour certains, une initiation aux longues rênes, pour d’autres une initiation au sous-solage et une mise en place de buttes.

*Ta gueule, ta bouche

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Mais pour tout le monde ce fut un grand cours de maraîchage ! Avec une explication du cycle de l’eau, de la terre et de l’environnement d’un potager ou d’un verger. L’apprentissage est intéressant voire même captivant et étonnamment, en l’espace de quelques instants, tous ces vastes sujets ont été abordés avec simplicité.

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Sur sa lancée, Corentin a pris une jeune génisse tout juste au début de son apprentissage et cela pour un long trajet. Le but était d’aller de chez Pascal à chez Jo. En la tenant toujours aux longues rênes. Il faut dire que pour le meneur comme pour la génisse, le trajet est long et éprouvant. Le cerveau est en perpétuelle réflexion chez les deux individus et la force est mise un peu à l’épreuve quand les deux esprits ne s’accordent pas.

 Pour finir, chez Jo, nous avons mangé entourés de woofers qui ont pu rajouter de la richesse à nos échanges.

 

–       Jeudi 18 : L’Écosse ne serait-elle pas un peu de retour

« L’évolution d’une séance d’ostéopathie n’est-elle pas incroyable au fils des jours »

Au fil des jours chez Jo, nous avons pu constater l’évolution de la séance d’ostéopathie faite le lundi. Pour récapituler, suite à la séance, la vache a commencé à boiter encore plus jusqu’au mardi en fin de journée. Le mercredi, elle s’est mise à remarcher plus normalement et son bassin commencé à se remettre droit. On voyait clairement le soulagement apporté à cette vache. Pauline a fait quelques derniers exercices pour être certaine de partir en laissant une vache bien dans son corps derrière elle, avant que qu’elle et Corentin ne plient bagage.

 

Nous sommes allés rencontrer Andy Gadet, un éleveur de Highland, lui aussi bouvier faisant de la traction animale avec des Charolais. Après un échange autour de quelques produits faits par ses soins grâce à son élevage de Highlands, il nous a montré, encore une fois, que les Highlands sont de merveilleux bovins très intelligents.

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Par la suite, nous sommes allés voir sa paire de Charolais extrêmement impressionnante par sa taille, mais les boeufs sont justement si grands que cela finit par rendre leur travail trop épuisant.

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Nous avons fini notre journée vers Allanche.

–       Vendredi 19 : Un peu de repos

« Aujourd’hui, je garde les pieds dans mes schlopps* »

Faut dire ce qui est, on n’a rien fait ce jours-là, mais c’est tout aussi plaisant que de voyager par moments.

Un peu de tourisme, quelques rencontres, … et puis l’appel d’une sainte brasserie qui nous a accueilli pour une visite avec dégustation… Un conseil, si vous passez par Allanche, arrêtez- vous à la brasserie des Estives, vous y serez bien accueillis, parole de dégustateurs !

 *chaussons

–       Samedi 20 : Une rencontre inattendue et si belle

« Faut dire que des bovins sur un site de concours modèles et allures pour chevaux c’est inattendu surtout quand ils appartiennent à un bouvier différent de la personne que nous sommes venus voir »

Alors là, on ne pensait vraiment pas que ça allait arriver. En faisant le tour du concours, on est tombé sur une paire de Salers. On a cru un instant que c’était la paire de André Varay, mais non… Sortis de nulle part, Maurice Chevalier était là, dans un coin du terrain, accompagné de Gaston et Mignon, ses deux bœufs Salers de 10 ans.

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 Nous pensons réellement pouvoir affirmer que ces deux bœufs sont les plus imposants rencontrés durant le voyage. Ils sont magnifiques … et une fois n’est pas coutume, nous avons pu lâcher un autre WAAAAAAAAHOUUUUU !

Maurice est un personnage incroyable qui partage la même passion que Corentin et Pauline : les bovins : il ne peut pas arrêter de pratiquer, ça lui paraît impossible !

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La journée a été très chaude et sans ombre. Tout le monde n’en est pas sorti indemne, les coups de chaleur ont été de la partie. Mais aucune perte à déplorer.

Par curiosité, Pauline a réalisé une séance sur l’un des bœufs, qui s’est avérée sportive vu leur taille et leur corpulence mais pour une première, elle s’en est bien sortie. On aurait dit une enfant devant le nouveau jouet de l’année, des paillettes dans les yeux à l’idée de poser ses mains dessus et d’essayer ses techniques manuelles. Un tabouret n’aurait clairement pas été de refus vu la taille…

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–       Dimanche 21 : C’est la fin, ne partez pas si vite, la dernière journée réserve une surprise et une remise en question.

« Sniff on peut pas arrêter maintenant si ? »

Eh oui c’est le dernier jour de ce périple.

Pour finir en beauté, nous sommes allés voir Jean Luc Guerringue.

En arrivant, il n’était pas seul. Il avait en effet invité un ami apprenti bouvier de quelques mois et une personne avec une année d’expérience aussi !

Notre échange s’est porté vers toute la traction animale avec un regard différent en fonction du panel d’expérience de chacun. Jean-Luc a profité de cette rencontre pour nous montrer sa paire, ses chevaux, son jardin, tout…

jl guerringue traversée corentin. La traversée des bouviers

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C’est sur ces dernières notes que s’achève finalement cette première aventure. Des animaux attendent Pauline pour leurs soins en Lorraine et Corentin aussi doit repartir pour différents rendez-vous et son travail. Mais cela n’est certainement pas une fin en soi, plutôt un entracte avant la suite de nombreuses aventures.

Corentin rajoutera juste :

          « Vers la fin de la journée, je me suis rendu compte de ce que nous avons vécu et appris. C’est passé si vite que j’ai oublié de penser à la suite : qu’est-ce qu’on va faire de cette histoire ? Faut-il la partager ? Faut-il changer quelque chose dans cette pratique ? Dans notre monde ? …

    Personnellement, je veux partager ces moments, c’est pour cela que vous avez pu lire cet article. C’est aussi suite à cet échange que je voulais partager avec vous une petite réflexion personnelle. Pourquoi faut-il toujours ramener le savoir en Alsace lors des rencontres annuelles de l’ascension, pourquoi ne pas aller aussi le chercher aux nombreuses sources existantes ? »

Comparaison de l’utilisation du joug de tête et du collier d’épaule en traction bovine d’un point de vue ostéopathique, Mémoire d’ostéopathie vétérinaire, Mélissa Boursier

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Pour valider son diplôme d’ostéopathie vétérinaire, Melissa Boursier devait rédiger entre autres, un mémoire. Elle a choisi un sujet qui lui plaisait et qui lui servirait : la traction bovine d’un point de vue ostéopathique en comparant le joug de tête et le collier d’épaule.

Voici donc son mémoire en lecture directe ainsi que la possibilité de le télécharger en cliquant ici: fichier pdf Dr Mélissa BOURSIER Mélissa – DIE ostéo – Mémoire

____________________

 

Comparaison de l’utilisation du joug de tête et du collier d’épaule en traction bovine d’un point de vue ostéopathique

 

1

 

Dr. Mélissa BOURSIER

Mémoire pour l’obtention du DIE d’ostéopathie vétérinaire 

2022

Enseignant-tuteur : Dr. Fabrice PECAULT 

Table des matières

  • Introduction                                                                                           
    Première partie : présentation de la traction bovine                            
    Histoire  3
    Etat des lieux                                                                                         
    De par le monde : effectifs humains et bovins, type de travail, conséquences sociales                                                                           
    En France                                                                                              
    Comparaison de deux types de harnachement : le joug de tête vs le collier d’épaule                                                                                     
    Le joug de tête                                                                                       
    Le collier d’épaule                                                                                
    Conséquences biomécaniques selon le harnachement utilisé              
    L’angle de traction                                                                               
    Les surfaces de contact entre le harnachement et l’animal                 
    La position de travail                                                                           
    Le poids du harnais                                                                             
    La transmission de l’effort dans l’espace                                           
    Biomécanique de la traction et de la propulsion                                
    Deuxième partie : étude du point de vue ostéopathique                     
    Matériel                                                                                               
    Méthodes                                                                                             
    Résultats                                                                                             
    Martin (béarnais, cf. figure n° 18) :                                                  
    Chouan (cf. figure n° 20) :                                                                
    Martin (bordelais, cf. figure n° 22) :                                                 
    Moris (cf. figure n° 24) :                                                                   
    Fleur (cf. figure n° 26) :                                                                   
    Plume (cf. figure n° 28) :                                                                  
    Grive (cf. figure n° 30) :                                                                   
    Fury (cf. figure n° 32) :                                                                    
    Analyse                                                                                             
    Discussion                                                                                        
    Conclusion                                                                                       
    Bibliographie                                                                                   
    Listes                                                                                                
    Figures                                                                                             
    Tableau                                                                                             
    Abréviations                                                                                     
    Annexes                                                                                            

     Un très grand merci à tous ceux qui ont participé de près ou de loin à la rédaction de ce mémoire, aux bouviers (Thomas FAURE, Flora MONTERRIN, Solène MORIN, Serge CAMMAS, Marie CADOT) pour leur passion, et à leurs animaux pour leur patience, à l’IMAOV qui offre plus qu’une formation, à mon enseignant-tuteur Fabrice PECAULT qui a pris de son temps libre précieux pour moi, à ma famille pour son soutien indéfectible.

     Une mention particulière pour le site internet « Attelages Bovins d’aujourd’hui » qui est un recueil formidable d’informations et de contacts, merci !

Introduction

      En ce début de XXIème siècle, il y aurait dans le monde plus de 400 millions d’animaux de trait appartenant à différentes espèces :

  • Les bovins (taurins Bos taurus et zébus Bos indicus)
  • Les bubalins (buffles Bubalus bubalis)
  • Les équidés (chevaux Equus caballus, ânes Equus asinus et mules)
  • Les camélidés (dromadaires Camellus dromedarius, chameaux Camelus bactrianus, lamas Lama glama) [1]

     Il sera question dans ce mémoire de s’intéresser à la traction bovine. L’équipement des animaux et les outils attelés ont évolué au fil du temps pour répondre aux besoins des hommes, tant sur le plan agricole que du transport en général. Pour ce qui concerne le harnachement des bovins, on trouve en France et en Europe deux procédés généralement pour transmettre la force de travail de l’animal à l’outil : le joug de tête et le collier d’épaule. Le joug de tête est une exception au niveau mondial où lui est préféré le joug de garrot. Le collier d’épaule est quant à lui considéré comme l’équipement d’attelage le plus abouti au regard du rendement de la force de travail et du confort de l’animal mais reste un équipement moins abordable tant financièrement que techniquement. Le choix de l’équipement découle encore beaucoup de la tradition.     

     L’approche ostéopathique proposée dans ce mémoire pourrait permettre un nouvel éclairage sur ce choix en présentant une comparaison des implications ostéopathiques de ces deux équipements sur l’animal lui-même, ce qui pourra être extrapolé au rendement de sa force de travail.

     Après avoir fait un bref historique, un état des lieux sera dressé sur la situation de la traction bovine dans le monde puis plus particulièrement en France. Ensuite seront comparées deux techniques d’attelage différentes : le joug de tête et le collier d’épaule, d’un point de vue biomécanique et d’un point de vue ostéopathique grâce à la présentation de quelques consultations d’ostéopathie de bovins de traction travaillant au joug ou au collier. L’ensemble des résultats permettra une discussion et tentera d’apporter des réponses quant au choix du matériel utilisé pour l’attelage.

Première partie : présentation de la traction bovine

Histoire

     L’histoire de la traction bovine est très ancienne et remonterait au Néolithique en Europe et au Proche-Orient, période allant de 5 800 à 2 500 ans avant notre ère. Utilisés pour leur lait et leur force dès leur domestication, les bovins ont certainement joué un rôle important dans le développement des populations humaines, tant sur le plan économique que symbolique, grâce aux échanges et aux déplacements.

      Des ossements attestent des contraintes liées à leur travail par la déformation des phalanges et des vertèbres. La comparaison avec des ossements de bovins domestiques actuels montre également que le recours à la castration était une pratique déjà employée au Néolithique. Sur certains sites, la fréquence élevée des atteintes pathologiques et l’intensité des déformations sur les premières et secondes phalanges antérieures chez ces bovins de petite stature (moins de 1,20 m au garrot) suggèrent des activités plutôt intensives de type traction lourde : labours, et peut-être aussi débardage (cf. figure n° 1). Ces animaux étaient conservés jusqu’à un âge avancé et avaient travaillé toute leur vie. [2]

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Figure n° 1: Une des représentations les plus anciennes d’attelage au joug en France : attelage de bovidés tirant un araire, guidé par un cultivateur, âge du Bronze ancien, gravures rupestres du Mont- Bégo (Saint-Dalmas-de-Tende, Alpes Maritimes, 1900 av. J-C) [3] 

En Europe, la traction animale a été, au fil des siècles, un facteur essentiel d’évolution des systèmes de production agricole avec la succession de deux périodes, celle de la traction animale légère de l’agriculture méditerranéenne du monde antique et celle de la traction animale lourde en Europe du Nord qui a permis le développement économique des zones plus froides. [4]

     Si le boeuf et l’âne sont les animaux les plus utilisés pour les tâches agricoles, à partir du XIème siècle, l’Europe fait figure d’exception dans l’emploi des animaux de travail : l’emploi du cheval en agriculture. Timidement au début puis allant s’intensifiant aux XVème et XVIème siècles, le cheval ira même jusqu’à supplanter le bovin dans certaines régions. Aux XVIIème et XVIIIème siècles, il y a désormais des régions à chevaux, en France le Nord, la Picardie, la Haute-Normandie, l’Ile de France, et des régions à boeufs : la Bourgogne du sud, l’Auvergne, le Limousin, le Poitou, etc. A la fin du XIXème siècle et au XXème siècle, le cheval reprendra sa progression aux dépens du boeuf jusqu’à ce que l’un et l’autre soient éliminés par le tracteur. [3]

     Dans les pays industrialisés, l’utilisation des animaux de trait a fortement régressé après la seconde guerre mondiale, c’est-à-dire au cours de la seconde moitié du XXème siècle, avec le développement de la motorisation. La place de l’énergie animale est désormais marginalisée mais elle garde toute son importance dans les pays en développement, notamment en Afrique subsaharienne où elle est d’implantation plus récente et où elle continue de se développer. [4]

Etat des lieux

De par le monde : effectifs humains et bovins, type de travail, conséquences sociales

     Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO, Food and Agriculture Organisation) les deux tiers des agriculteurs, soit plus de 800 millions de personnes, travaillent encore essentiellement à la main. Viennent ensuite les utilisateurs de la traction animale qui représentent environ un tiers des agriculteurs, soit 400 millions de personnes, suivis par ceux qui bénéficient de la mécanisation motorisée, soit 30 millions d’agriculteurs. [5]

     Bien que les progrès technologiques aient pu supplanter la traction animale, cette dernière reste très importante dans de nombreux pays.

     Grâce à leur force, ces animaux réduisent significativement la pénibilité des travaux agricoles et permettent d’autres activités comme le transport des personnes ou des marchandises, l’exhaure de l’eau [6], ou bien encore la création de dispositif anti-érosion ou des chemins. [5]

     La traction animale permet ainsi la production alimentaire et sa commercialisation pour les familles l’employant dont elle améliore la sécurité alimentaire et la viabilité économique. [5]
Au début du XXIème siècle, la place de la traction animale est extrêmement variable d’un pays à l’autre et on reconnait schématiquement trois types de situations :
      celle de la plupart des pays industrialisés qui ont pratiquement abandonné l’utilisation de l’énergie animale,
      celle de nombreux pays en développement ou émergents où les évolutions des systèmes de production sont rapides et tendent souvent vers le remplacement des animaux de trait par des tracteurs ou des motoculteurs (cf. figure n°2),
      celle enfin de pays moins avancés où la traction animale est encore d’actualité et présente même souvent des solutions d’avenir pour les petites exploitations agricoles, encore majoritairement en travail manuel. [5]

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Figure n° 2 : Graphique comparant les utilisations des différentes formes d’énergie, dans les pays en développement et dans les pays développés [5]

En France

   Même si on ne saurait être exhaustif, beaucoup de praticiens de la traction bovine (bouviers) manquant de temps et communiquant peu sur leur pratique, il a été recensé en 2014 environ 198 paires de bovins au travail et 21 bœufs en solo. Les bouviers se répartissent comme suit :

  • 59 exploitants agricoles
  • 14 retraités
  • 27 en attelages de loisir
  • 10 structures organisatrices de spectacles
  • 12 particuliers

    Ces bouviers sont des passionnés, la plupart issus du milieu agricole et les jeunes y sont bien représentés. La traction bovine est vue comme un moyen de maintenir certaines races à faible effectif. Ces bovins participent aux tâches agricoles, mais aussi à des activités de débardages ou à des démonstrations.
La formation existe, que ce soit par des centres de formation (Montmorillon, Oloron-Ste-Marie) ou dispensée par des professionnels.

    Malgré tout, la pratique reste précaire voire confidentielle. Il y a des réflexions constantes sur la conception, l’évolution ou l’adaptation du matériel de traction animale. [7]
Des réflexions sur la durabilité des pratiques agricoles orientent l’emploi de la traction animale comme un bon compromis en termes d’efficience économique, d’équité sociale et de respect de l’environnement. [8] Ces avantages permettent à cette pratique d’avoir survécu à la motorisation et de regagner du terrain.

    En résumé, il apparaît que la traction animale bovine est très ancienne et remonterait au Néolithique. Elle a grandement participé aux développements des civilisations humaines grâce aux nombreux services qu’elle a rendus : production de nourriture, transport de marchandises et de personnes, débardage, exhaure de l’eau, etc. Deux situations sont constatées selon que l’on se situe dans les pays industrialisés où elle a cédé la place à la motorisation, ou bien dans les pays en développement où elle continue de progresser. Elle offre de nombreux avantages tant sur les plans agricole, social qu’écologique.

Comparaison de deux types de harnachement : le joug de tête vs le collier d’épaule

     Pour être fonctionnel, un harnachement doit assurer la mise en mouvement en avant et en arrière, le ralentissement et l’arrêt, la traction de divers matériels et véhicules à deux ou quatre roues. [9]

Le joug de tête

     Le joug de tête, ou joug de cornes (cf. figure n°3), se distingue du joug de garrot qui comme son nom l’indique, se place en avant du garrot. Il permet d’atteler en paire, bien qu’un joug plus réduit, le jouguet, permette la configuration d’un attelage en solo, utilisé principalement pour le dressage du bovin. Nous nous intéresserons au joug le plus rencontré de nos jours en France, c’est-à-dire le joug de tête pour atteler une paire de bovins.

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Figure n° 3 : Illustration d’un joug de tête reposant sur la nuque [10]
Histoire et aire de répartition

     Le joug de tête est une exception Européenne. Il est attesté en Egypte ancienne mais il y a disparu depuis bien longtemps. Son histoire est mal connue mais on sait qu’au XIXème siècle, le joug de cornes occupait une partie de l’Espagne, la Franceet le Sud-Ouest de l’Allemagne.

       Dans le reste du monde, il est complètement inconnu et c’est le joug de garrot qui est utilisé. Sa prépondérance en Europe est d’autant plus curieuse que d’un point de vue technique, le joug de garrot semble plus avantageux : plus simple, moins coûteux, plus facile à poser, il laisse une plus grande liberté de mouvement aux animaux et donc un meilleur rendement pour une fatigue moindre. Le seul avantage du joug de tête par rapport au joug de garrot résiderait dans le fait que les animaux seraient, du fait d’être attachés l’un à l’autre rigidement, plus faciles à conduire car leurs mouvements de tête seraient canalisés. Ceci apporte une certaine sécurité pour le bouvier. Mais avec des animaux bien dressés, cet avantage est minime. [3] Monsieur Thomas Faure, bouvier à l’écomusée de Marquèze dans les Landes, confiait également que lier une paire de bovins au joug prend bien moins de temps que d’équiper une seule mule avec un harnachement complet au collier.

     Pousser avec la tête fait partie de l’éthogramme des bovins et serait une des explications de l’emploi du joug de tête, mettant à profit ce comportement naturel.

     Il est difficile de faire un tour exhaustif des jougs de tête existants tant leur forme et la manière dont ils sont attachés à la tête des animaux, ce qu’on appelle le liage, diffèrent selon les régions et les races de bovins employées. Il peut ainsi être posé à l’avant des cornes, « joug de front », ou à l’arrière des cornes, « joug de nuque ». C’est habituellement une pièce en bois dont l’essence varie selon la région : le bouleau, le frêne, le chêne, mais aussi l’aulne, le cormier, le hêtre, le noyer, le tilleul. Sa fabrication nécessite un réel savoir-faire de la part du jouguier. Les plus longs pour les labours vont jusqu’à 1,90 m et une trentaine des kilogrammes, ceux pour les charrois font entre 1,10 m et 1,60 m de long pour une dizaine de kilogrammes. Des protections en tissu ou en paille sont placées entre le joug et l’animal pour le protéger. Le tout est lié avec de courroies. Le joug est ensuite attaché au timon soit par une attache souple avec des anneaux, des courroies, etc., ou bien rigide, le timon s’engageant alors dans un orifice directement percé dans le joug puis bloqué par des chevilles. [9]

Les jougs de nuque nécessitent des bovins pourvus de cornes solides, de préférence orienté vers le haut et vers l’avant. [11]
     Nous allons voir en détail le joug occitan, qui est un joug de tête très élaboré et qui nous permettra d’illustrer les conséquences biomécaniques d’un tel outil.

Un exemple, le joug occitan

Description des différentes parties constituant un joug (cf. figure n°4)

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Figure n° 4 : Illustration d’un joug occitan vu de face [12]

  • 1. Embanures : logements qui reçoivent les cornes. Elles ont un rôle de mise en position de la tête de chaque bovin l’un par rapport à l’autre. Ce sont les « surfaces de références »
  • 2. Suca ou suco : coiffe le chignon de chaque animal mais ne doit pas le toucher. Il guide les courroies sur les cornes pour effectuer le liage
  • 3. Capet : partie du joug au-dessus de chaque tête
  • 4. Trou de passage pour la méjane : la méjane est une forte courroie de cuir avec un système de boucle qui permet de pendre les deux anneaux dans lesquels passe le timon. C’est une des manières de lier le joug au timon
  • 5. Joues : elles viennent contre les oreilles de l’animal, rabattues sur l’arrière. Les oreilles ainsi plaquée mais non serrées permettent de faire amortisseur entre le crâne et le joug
  • 6. Capières : emplacements qui reçoivent la tête. Les joues font partie des capières
  • 7. Chemin de passage des courroies vers le front et vers les cornes           
  • 8. Chemin de passage des courroies depuis les cornes vers l’arrière (ou inversement) afin qu’elles fassent le tour du joug 
  • 9. Catel ou tenon : il y en a un de chaque côté, ils permettent de terminer de lier les courroies en les y nouant par deux demi-clefs [12]

Zones de portance du joug

    Le joug, pour développer tout son potentiel et ne pas blesser l’animal, doit être le plus ergonomique possible. Il doit « mouler » la tête de l’animal. Il porte sur les cornes et sur la nuque (cf. figures n° 5 et 6). Les cornes ne doivent pas porter sur leur naissance près du crâne, qui est une zone fragile mais à quelques centimètres de là.

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Figure n° 5 : Illustration de la capière droite d’un joug vu de dessous et de derrière montrant la zone d’appui sur la nuque [12]

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Figure n° 6 : Illustration de la capière droite d’un joug vu de face montrant la zone d’appui des cornes et les zones où elles ne doivent pas porter [12]

Les courroies assurent deux rôles :

  • Celles passant sur les cornes maintiennent le joug fermement à la tête de l’animal
  • Celles passant sur le front assurent la réception de l’effort de traction

Le bovin ne doit pas tirer avec ses cornes mais essentiellement avec son front.
Enfin, le joug présente deux courbures, ou galbes. L’un dans le plan frontal (cf. figures n° 7 et 8) et l’autre dans le plan transversal (cf. figure n° 9). Le premier a deux fonctions: 

  • Permettre le croisement des cornes dans la partie médiane du joug.
  • Donner plus de maniabilité dans les virages car les axes longitudinaux qui passent par chaque animal ne sont pas parallèles mais se croisent plusieurs mètres devant.

L’animal de droite a généralement la tête plus inclinée que l’autre.

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Figure n° 7 : Illustration d’un joug vu de dessus montrant le galbe dans le plan frontal [12]

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Figure n° 8 : Illustration d’une paire de bovins attelés au joug vu de dessus montrant le galbe dans le plan frontal et montrant la projection des trajectoires de chaque animal [12]

    Le galbe dans le plan transversal permet également aux cornes de se croiser sans se toucher, ce qui serait inconfortable pour les bovins dans le cas contraire. Là aussi les axes passant par la tête des animaux ne sont pas symétriques, généralement, c’est l’animal de droite qui a la tête légèrement plus inclinée que l’autre (cf. figure n° 9).

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Figure n° 9 : joug vu de face montrant le galbe dans le plan transversal, la courbure étant exagérée ici [12]

    Ce type de joug est particulièrement ergonomique s’il est bien ajusté mais présente l’inconvénient de ne pas pouvoir être interchangeable à plusieurs paires de bovins. D’autres jougs avec des emplacements pour les cornes moins marqués ou carrément inexistants, et sans galbe, sont plus faciles à transposer à d’autres paires mais ont l’inconvénient de ne pas être parfaitement ajustés ni de soigner le croisement des cornes dans la partie médiane du joug. [12] De plus, cela revient moins cher de se procurer des jougs de récupération plutôt que d’en faire fabriquer un sur mesure.

    En résumé, le joug de nuque en paire est d’utilisation traditionnelle en France et dans certains pays européens, là où il est inexistant dans le reste du monde. Sa fabrication relève d’un vrai savoir-faire pour permettre un bon ajustement aux animaux et une bonne efficacité dans le maniement de l’attelage.

Le collier d’épaule

     Dans un article sur l’adaptation du collier bovin de Berne pour les pays en développement, publié sur le site de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, la FAO, l’auteur présente les jougs en général comme ayant été conçus pour faciliter le contrôle de l’animal. Ils sont peu coûteux et relativement facile à fabriquer. Malheureusement, selon lui, l’utilisation efficace de la puissance de traction et le confort de l’animal ne sont pratiquement jamais pris en compte. [13]

     En 1920, Maximilien Ringelmann, universitaire français membre de l’Académie d’agriculture de France, établit qu’un boeuf équipé d’un collier pourrait accomplir la même quantité de travail que deux boeufs attachés à un joug. [14] Cependant, selon P. STARKEY, ceci est sans doute vrai pour un travail de traction légère mais ne se vérifie pas dans ces proportions lors d’un travail de traction lourde. [15]

    Il est généralement admis que le meilleur harnachement équipé à un animal est le collier d’épaule chez le cheval. Il fait sa première apparition en Europe au XIème siècle mais on ne sait pas s’il a été inventé sur ce continent ou s’il a été importé de l’Orient par les tribus Mongoles. Pour autant ce matériel n’a été que très peu utilisé pour des animaux de trait autres que le cheval, en Europe et ailleurs dans le monde. La Suisse fait figure d’exception, les agriculteurs y ayant adapté le collier pour chevaux aux bovins. Il prend le nom de « collier de Berne » (cf. figure 10).

    Le collier de Berne a été simplifié par la suite pour arriver au « collier à trois matelassures » ou « collier suisse simplifié » dans lequel seules les épaules de l’animal sont protégées par des matelassures tandis qu’un troisième patin est fixé en haut entre les deux attelles pour maintenir le collier en position sur le corps (19, cf. figure n° 11).

 

 

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Figure n° 10 : Illustration du collier de Berne en place sur un bovin [16]

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Figure n° 11 : Illustrations du collier simplifié, seul et en place sur un bovin [16]

  La conception de ce collier simplifié doit respecter ces quelques règles :
      Les attelles sont formées de deux pièces de bois qui doivent épouser au mieux le contour des épaules pour apporter un maximum de confort
      Les matelassures permettent de protéger les épaules des frottements et de la pression des attelles [13]
      L’un des inconvénients du collier est sa relative fragilité. En cas de choc, une des attelles peut casser, le crochet de fermeture peut lâcher, etc. [17]
     Ce collier est plus léger, plus facile à concevoir et moins coûteux que le collier de Berne, le rendant plus abordable.

     En résumé, le collier d’épaule est d’utilisation plus confidentielle en France. Il est moins abordable en termes de prix et de fabrication que le joug mais semble offrir une grande efficacité.

Conséquences biomécaniques selon le harnachement utilisé

     Quelle que soit l’espèce, l’animal de traction doit être un animal assez compact, plutôt lourd que long. La force de traction déployée est proportionnelle au poids de l’animal [18], bien que certains auteurs modèrent ces critères. [19] Les membres sont bien écartés, droits, musclés, courts, les pieds sont sains et durs. Le thorax ample et profond pour assurer une bonne oxygénation, l’encolure droite. [18]

     La morphologie de l’animal mise à part, les différents types de harnachement auront un impact sur le fonctionnement biomécanique de l’animal lors de l’effort fourni en traction. Différents facteurs entrant en jeu seront détaillés pour mieux appréhender les avantages et inconvénients du joug et du collier l’un par rapport à l’autre.

L’angle de traction

     L’angle créé entre la ligne où s’applique la force de traction d’une part, et l’horizontale d’autre part, est l’angle de traction (θ, cf. figure n° 12).

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Figure n° 12 : Schéma des différentes forces en traction animale et de l’angle de traction [20]

    Cet angle doit être le plus petit possible afin d’utiliser la puissance de l’animal au maximum. Plus l’angle augmente et plus la force de traction se divise au niveau du point d’attache à l’animal (cf. figure n° 13). Une partie de la force est perdue pour le processus de traction et exerce une pression sur l’animal (R). Un angle de traction à 30 °, qui est plus facilement rencontré avec un joug de tête, va rajouter environ 50 kg de poids supplémentaire à l’animal, sans compter le poids du harnachement. [13]

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Figure n° 13 : Illustration montrant l’impact de l’angle de traction sur les forces s’appliquant à l’animal [20]

 

     Le collier offre l’avantage par rapport au joug d’abaisser l’angle de traction et donc de mieux transmettre la force de l’animal à l’outil attelé.

Les surfaces de contact entre le harnachement et l’animal

     L’efficacité d’un harnais est grandement liée à sa façon d’épouser le corps de l’animal et de répartir les zones de pression. Avec un joug de tête la surface de contact est d’environ 200 cm². Avec un collier aux matelassures bien ajustées et rembourrées, on obtient une surface de contact de 600 cm² par épaule soit 1200 cm² pour les deux épaules. La surface est augmentée d’un facteur 6 et réduit d’autant la pression par unité de surface (P = F/S, avec P la pression, F la force appliquée et S la surface). [13]

     Ainsi, le collier permet d’augmenter la surface de contact entre le harnachement et l’animal par rapport au joug, ce qui laisse suggérer un plus grand confort de l’animal.

La position de travail

     Le harnachement doit être conçu de sorte que l’animal puisse utiliser son corps dans une position la plus naturelle possible. Le port du joug modifie plus sensiblement la posture de l’animal et les cahots de la route sont transmis directement aux zones sensibles des cervicales, des sinus et des os crâniens. [13] De plus, le manque de liberté de mouvement peut amener l’animal à maintenir la tête ou la nuque dans une position inconfortable (cf. figure n° 14). Cependant, les blessures s’expliquent souvent par une installation ou une utilisation inadaptée des jougs. [11] Les jougs dans lesquels le timon s’insère dans un trou médian permettent à ce dernier de tourner à l’intérieur du joug [17] et de limiter les postures telles qu’adoptées dans la figure n° 14 :

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Figure n° 14 : Photographie montrant une contrainte de la position de la tête, ici en rotation droite, imposée par le joug lors d’un travail en dénivelé [21]

     Un mauvais positionnement du joug aura plus facilement tendance à créer de l’inconfort ou des blessures à l’animal, ce dernier étant plus contraint dans sa posture. Il est évident qu’un bon ajustement du matériel est primordial quel que soit le harnachement choisi.

Le poids du harnais

     Idéalement, le harnais doit être le plus léger possible. Le collier de Berne est relativement lourd et pèse environ 20kg. Les versions simplifiées sont beaucoup plus légères et font environ 10 kg. [13] Le poids d’un joug de tête est réparti sur les deux animaux donc chacun porte environ 10 kg minimum.

Les poids des deux harnachements ne diffèrent pas significativement.

La transmission de l’effort dans l’espace

     Le joug de tête étant solidaire de l’animal, il permet aux animaux de développer des efforts dans des directions diverses. Par exemple lors de travaux forestiers, les animaux peuvent soulever l’extrémité d’une grume en soulevant la tête. De même, lorsque le matériel agricole est relié à l’animal par un timon rigide plutôt que des chaines, les jougs de nuque peuvent faciliter le freinage et les changements de directions. [11] Ce qui n’est pas le cas si le collier est utilisé seul sans sellette et avaloir, et donc nécessite un matériel complémentaire pour parvenir à ces fins.

     Le timon est plus long lorsque que les animaux sont attelés au joug de tête plutôt qu’au collier d’épaule et offre donc plus de bras de levier pour faire pivoter l’essieu avant. [17]
L’avantage du collier c’est qu’il facilite le franchissement d’obstacle comme des fossés ou de très fortes pentes. [17]

     Le joug semble plus efficace pour transmettre l’effort dans des directions variées.

Biomécanique de la traction et de la propulsion

     Pour pouvoir transmettre une force à un élément tiré par l’intermédiaire de son harnachement, l’animal va devoir verrouiller les parties de son corps entre ce qui lui fournit la propulsion, c’est-à-dire ses membres postérieurs et plus particulièrement l’articulation coxo-fémorale via les muscles fémoraux caudaux (muscles semi-tendineux, semi-membraneux et glutéobiceps), [22] et le point d’appui qui va recevoir l’effort, c’est-à-dire la zone d’attache du harnachement : la tête et plus particulièrement la zone du front dans le cas du joug, et les épaules dans le cas du collier. Cependant, le bouvier Philippe Kuhlmann fait la différence entre le cheval qu’il apparenterait à un « moteur à propulsion » et le bovin qui serait plus une « traction avant ». [23] Ce seraient donc les membres thoraciques qui auraient un rôle prépondérant par rapport aux membres postérieurs selon lui, même si ces derniers participent forcément à l’effort.

      Dans le cas du joug, l’animal va rigidifier principalement l’ensemble du rachis depuis l’articulation atlanto-occipitale jusqu’à l’articulation sacro-iliaque et aligner le plus possible ses vertèbres cervicales en abaissant légèrement la tête. Dans le cas du collier d’épaule, la portion du corps en verrou débutera depuis l’articulation scapulo-thoracique (par contraction des muscles rhomboïde, trapèze crânial et grand dorsal, ce qui amène à une verticalisation de l’épaule [22]) puis sur le rachis de la portion allant du garrot à l’articulation sacro-iliaque. L’animal obtient cette rigidification du rachis notamment par l’abaissement du levier cervical qui vient mettre en tension par le biais du ligament nuchal les apophyses épineuses des premières thoraciques qui font office de bras de levier sur le rachis. La tension se poursuit jusqu’au sacrum via les ligaments supra- et inter-épineux (cf. figures n° 15 et 16).

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Figure n° 15 : Schéma de la mise en tension de l’animal dans le cas d’un travail au joug (dessin personnel inspiré en partie de [22])

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 Figure n° 16 : Schéma de la mise en tension de l’animal dans le cas d’un travail au collier d’épaule (dessin personnel inspiré en partie de [22])

     Contrairement à la croyance populaire et perpétuée par l’utilisation des jougs, les bovins ne tirent pas mieux par la tête, mais comme chez les chevaux, leur force de traction vient des épaules et du tronc. [13, 14]

     Dans le cas du collier, la tête étant libre, l’animal peut utiliser son balancier cervical pour accompagner les différentes phases de la foulée. Dans le cas du joug, il est privé du balancier cervical.
Il semblerait que le collier soit intrinsèquement plus efficace que le joug. Cependant, les expériences scientifiques portant sur un nombre statistiquement recevable d’animaux dans le but de comparer avec précision le pourcentage de rendement supérieur du collier sur le joug manquent ou bien font état de faible pourcentage d’amélioration relative (7 à 9 %). [16] Les avantages avancés pour le collier par rapport au joug sont : l’augmentation de la surface de contact, l’abaissement de l’angle de traction et le confort de l’animal. [15]

      La biomécanique de la traction permet de faire des hypothèses des zones où les tensions sont maximisées : pour le joug : le crâne et les cervicales hautes. Pour le collier : la scapulo-thoracique, la scapulo-humérale et la zone du garrot. Ensuite, la mise en tension du reste du rachis apparaît similaire dans les deux cas de figure.

     En résumé, l’histoire très ancienne de la traction animale prendrait racine au Néolithique. Les animaux de trait, dont les bovins, ont accompagné les civilisations humaines dans leur développement. La mécanisation a supplanté l’énergie animale dans les pays industrialisés mais la traction animale continue de progresser dans les pays en développement où elle est d’implantation plus récente.
En France, où la traction animale a su perdurer par endroits, deux types de harnachement sont utilisés : le joug de nuque en paire, d’utilisation traditionnelle et qui fait figure d’exception pour une grande partie du monde ; et le collier d’épaule, plus confidentiel, moins abordable au premier abord mais qui semble très efficace et plus confortable pour l’animal.
Les avantages agricoles, sociaux et écologiques qu’offre la traction animale ne doivent pas faire oublier le respect de l’intégrité de l’animal qui prête sa force, au titre de n’importe quel sportif et les connaissances en biomécanique et l’ostéopathie peuvent apporter des solutions pour prendre soin des animaux et prévenir d’éventuelles atteintes de l’organisme.

 Deuxième partie : étude du point de vue ostéopathique

Matériel

     Pour rentrer dans l’étude les animaux doivent être des bovins en formation ou en travail pour de la traction animale. Ils peuvent être travaillés au joug, au collier, ou les deux.

     L’âge et le sexe ne sont pas des critères d’inclusion ou d’exclusion, dans la limite de l’adéquation entre le travail demandé et la croissance de l’animal pour ce qui concerne l’âge.

     Les contre-indications habituelles inhérentes à la consultation ostéopathique s’appliquent, c’est-à-dire que ne seront pas acceptés des animaux présentant une tumeur ou un cancer en évolution, un accident traumatique aigu, une maladie infectieuse évolutive non jugulée ou une décompensation organique en phase avancée. Enfin, les animaux doivent être coopératifs et vigiles pour rentrer dans l’étude. [24]

     Ce sont au total 8 animaux qui vont être présentés pour cette étude, vus en consultation d’ostéopathie sur une période allant du 19/06/2022 au 06/07/2022 :

      2 boeufs béarnais, Martin et Chouan, d’un an et demi, actuellement en apprentissage. Ils portent le joug 2 fois par jour entre 20 minutes à 1 heure 30 minutes par cession, sans tirer de charge. Martin est à gauche, Chouan à droite. Martin est plus petit que Chouan. Martin est le moteur de la paire. Ils sont destinés à travailler en maraîchage et faire des animations à l’écomusée de Marquèze à Sabres dans les Landes. Pour distinguer ce Martin du suivant (cf. paragraphe ci-dessous), il sera appelé désormais « Martin (béarnais) ».
      1 boeuf bordelais x Prim’Holstein, Martin, de 12 ans et demi, qui a travaillé pendant 8 ans jusqu’à début avril au joug en paire avec un autre boeuf un peu plus grand que lui, pour du maraîchage et des animations à l’écomusée de Marquèze à Sabres dans les Landes. Martin était à gauche et il était le moteur de la paire. Son collègue de paire, atteint d’un lymphome, va être euthanasié. Martin va être reconverti pour du bât en pré-retraite ou être vendu. Il sera nommé dorénavant « Martin (bordelais) ».
       1 boeuf vosgien, Moris, de 12 ans. Il fait des animations et quelques travaux agricoles, principalement au collier ou au jouguet, à Gavaudun dans le Lot-et-Garonne
      2 vaches vosgiennes, Fleur et Plume, en arrêt pour le moment suite à leur vêlage respectif en avril 2022, à Gavaudun dans le Lot-et-Garonne
      1 vache Brune des Alpes, Grive, de 11 ans, attelée au collier et réalisant plusieurs travaux agricoles et du transport, ainsi que des animations, à Castelsarrasin dans le Tarn-et-Garonne
      1 vache Blonde d’Aquitaine, Fury, de 3 ans, en formation au collier, à Castelsarrasin dans le Tarn-et-Garonne

Méthodes

     Après avoir recueilli les commémoratifs et une éventuelle anamnèse pour chaque animal, le bovin était vu en consultation générale et ostéopathique dans l’objectif d’établir un diagnostic ostéopathique, dans l’intérêt de l’animal lui-même, et à des fins d’analyses ultérieures pour le présent mémoire. Enfin, les animaux étaient traités selon les principes de l’ostéopathie vétérinaire. Les traitements ne seront pas détaillés dans ce mémoire car ils ne rentrent pas en compte dans l’étude.

Résultats

Martin (béarnais, cf. figure n° 18) :

Commémoratifs et anamnèse :

     (Cf. la partie Matériel, p 15). Il est plus petit que l’autre bovin de paire, ce qui occasionne un port de tête bas et en rotation droite. Sa colonne vertébrale présente des incurvations dans le plan frontal pendant le travail.

Examen clinique :

     L’examen clinique n’a montré aucune anomalie particulière si ce n’est l’orientation non symétrique des cornes, celles-ci s’orientant vers la droite.
Examen ostéopathique et chaine dysfonctionnelle (cf. figure n° 17) :

 19

 Figure n° 17 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Martin (béarnais)

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Figure n° 18 : Photographie de Martin (béarnais)

     Le MRP du système cranio-sacré était asynchrone de façon marquée. Les dysfonctions s’organisaient sur un axe latéral gauche.

     L’occiput (gauche ventral) avait la mobilité la plus réduite, et a été considéré comme la dysfonction primordiale. Par continuité anatomique, il relie le temporal gauche (en expir). Le muscle long de la tête rejoint l’occiput et la face ventrale des processus transverses de C3 (ERSD). L’occiput et le sacrum (base gauche dorsale) sont en relation via les méninges, notamment la dure-mère. Vers l’arrière par l’articulation sacro-coccygienne, le sacrum est relié à la Cd1 (FRS droite). Vers l’avant par l’intermédiaire du fascia iliaca, le sacrum est en relation avec à L2 (FRSG) puis à la loge rénale du rein gauche (dorsal, médial, caudal). De plus, il existe un lien métamérique entre L2 et le rein. Le fascia endothoracique fait la jonction entre L2 et T7 (FRSD).

     Le grasset droit (rotation interne, extension, abduction) est plus une compensation de l’axe latéral gauche et vient apporter de l’impulsion pour seconder l’occiput lors du travail.

Chouan (cf. figure n° 20) :

Commémoratifs et anamnèse :

     (Cf. la partie Matériel p 15). Tout comme Martin (béarnais), Chouan a un port de tête en rotation droite car il est solidaire du joug.

Examen clinique :

     L’examen clinique n’a montré aucune anomalie particulière si ce n’est l’orientation non symétrique des cornes, celles-ci s’orientant vers la droite mais de façon moins marquée que chez Martin (béarnais).

 21

 Figure n° 19 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Chouan

22

Figure n° 20 : Photographie de Chouan

     Les dysfonctions ostéopathiques de Chouan suivent pour certaines d’entre elles le même schéma que celles de Martin (béarnais) mais en moins prononcées. D’autres sont propres à Chouan.
     Ainsi on retrouvait un asynchronisme crâne-sacrum mais léger cette fois, ainsi que l’occiput (gauche ventral), en lien avec le temporal gauche (en expir) par continuité anatomique. De même, l’occiput et le sacrum (base gauche dorsale) sont reliés dans le système cranio-sacré par les méninges. Chez Chouan, c’est L3 (FRSG) qui peut être mise en relation avec le sacrum via le fascia iliaca. Le foie (dorsal, crânial et médial) peut être en relation à L3 via les piliers du diaphragme, le diaphragme lui-même puis les ligaments triangulaires droit et gauche, falciforme et coronaire.

Martin (bordelais, cf. figure n° 22) :

Commémoratifs et anamnèse :

(Cf. la partie Matériel p 15).

Examen clinique :

L’examen clinique n’a montré aucune anomalie particulière.

Examen ostéopathique et chaine dysfonctionnelle (cf. figure n° 21) :

23

Figure n° 21 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Martin (bordelais)

24

Figure n° 22 : Photographie de Martin (bordelais)

     Les dysfonctions s’organisaient sur un axe latéral gauche. Le MRP du système cranio-sacré avait un léger décalage de phase.

     Chez Martin (bordelais), deux dysfonctions vertébrales étaient proches. Il se peut que la raison soit que la fixation était suffisamment marquée et étendue pour affecter toute cette région. La charnière thoraco-lombaire pouvait être considérée comme la dysfonction primordiale pour ce cas-ci. Ainsi T13 (FRSD) et L2 (FRSD) sont intimement en relation par les piliers du diaphragme, eux-mêmes s’enchevêtrant dans les psoas et mettant en relation l’ilium gauche (dorsal). La caillette (dorsale, médiale, crâniale) peut être mise en relation avec T13 par le système nerveux autonome mais aussi avec l’occiput (gauche ventral) via le nerf vague. Depuis la caillette et le diaphragme par contiguïté, les tensions pouvaient suivre le fascia endothoracique puis les fascias axillaire, brachial et antébrachial droits jusqu’au coude droit (rotation interne, extension et abduction). C3 pouvait être en lien avec la caillette par la lame pré-vertébrale du fascia cervical profond puis le fascia endothoracique, le diaphragme et le péritoine. Enfin, depuis l’ilium gauche et en passant par les fascias lata, jambier et du pied, les tensions pouvaient rejoindre le boulet du postérieur gauche (rotation interne, extension et adduction).

Moris (cf. figure n° 24) :

Commémoratifs et anamnèse :

     (Cf. la partie Matériel p 15). Moris a fait une fourbure il y a quelques mois, qui s’est traduite par des douleurs podales principalement et donc une boiterie. Il a été vu par un maréchal ferrant qui lui a fait un parage et qui a préconisé de réduire sa ration. La boiterie a disparu depuis.

Examen clinique :

     L’examen clinique n’a montré aucune anomalie particulière si ce n’est un surpoids estimé à 7/9 et un affaissement de la colonne vertébrale en arrière de la jonction thoraco-lombaire et un testicule gauche encore assez volumineux malgré la castration à la pince effectuée il y a des années. Nous suspectons un effet partiel de la castration au vu de la morphologie de Moris, proche de celle d’un taureau (cf. figure n° 24). De plus, l’orientation des cornes de Moris est asymétrique, la corne de droite poussant plus vers l’extérieur que son homologue (cf. figure n° 24).

Examen ostéopathique et chaine dysfonctionnelle (cf. figure n° 23) :

25

Figure n° 23 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Moris

 

26 27

Figure n° 24 : Photographies de Moris et de l’orientation de ses cornes

     Les dysfonctions s’organisaient selon un axe diagonal gauche avec le boulet du postérieur gauche compensatoire. Le système crânio-sacré va plus en expir.

     La dysfonction du foie (zone de densité diffuse) semblait être la plus marquée et centrale dans le schéma des dysfonctions. Elle a donc été considérée comme la dysfonction primordiale. Puis en suivant le ligament hépatorénal les tensions arrivent au rein droit (médial, ventral et caudal). La loge rénale est reliée à L3 (FRSG) puis à L6 (FRSG) via les psoas et à l’attache du cordon spermatique droit (crâniale, médiale et dorsale) par le fascia transversalis et fascia spermatique interne. Depuis le foie et sa relation étroite avec le diaphragme via les ligaments triangulaires, falciforme et coronaire, les tensions pouvaient cheminer par le fascia endothoracique puis axillaire et brachial pour arriver la scapulo-humérale droite (extension rotation externe et abduction). La scapulo-humérale et l’occiput (gauche ventral) sont reliés par le fascia axillaire et la lame prévertébrale du fascia cervical profond. Enfin, depuis l’occiput et la symphyse sphéno-basillaire puis l’ethmoïde, on peut rejoindre la crista galli et l’attache crâniale de la faux du cerveau (rostrale). Enfin, le boulet du postérieur gauche (rotation interne, adduction, flexion) semble être isolé de la chaîne et était peut-être une conséquence de la fourbure.

Fleur (cf. figure n° 26) :

Commémoratifs et anamnèse :

     (Cf. la partie Matériel p 15). Fleur a eu un veau par césarienne en février 2022. Fleur est habituellement à droite au joug avec Plume.

Examen clinique :

     L’examen clinique n’a montré aucune anomalie particulière si ce n’est la cicatrice de la césarienne encore palpable au niveau musculaire et cutané.

Examen ostéopathique et chaine dysfonctionnelle (cf. figure n° 25) :

28

Figure n° 25 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Fleur

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Figure n° 26 : Photographie de Fleur

     Les dysfonctions s’organisaient selon un axe diagonal droit.

     L’utérus (zone de densité à gauche correspondant probablement à la suture de la césarienne) semblait être le plus fixé lors de la consultation et semblait être la dysfonction primordiale. Le ligament large met en relation l’utérus avec les psoas et L4 (FRSG). Les psoas pouvaient également transmettre les tensions au rein gauche (ventral, médial, caudal). La chaine devenait alors plus superficielle, mettant en relation la L4 avec le fascia thoraco-lombaire et le muscle rhomboïde thoracique et T5 (FRSG), se prolongeant ensuite par le muscle dentelé et la scapulo-thoracique gauche (dorsale, caudale et médiale). Le muscle trapèze cervical pouvait transmettre les tensions à l’occiput (droit ventral). En repassant de façon plus interne, l’occiput pouvait être en relation avec la symphyse sphéno-basillaire (en expir et en side-bending rotation gauche) par continuité anatomique.

Plume (cf. figure n° 28) :

Commémoratifs et anamnèse :

     (Cf. la partie Matériel p 15). Plume est habituellement à gauche au joug avec Fleur.

Examen clinique :

     L’examen clinique n’a montré aucune anomalie particulière.

Examen ostéopathique et chaine dysfonctionnelle (cf. figure n° 27) :

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Figure n° 27 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Plume

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Figure n° 28 : Photographie de Plume

     Les dysfonctions étaient principalement situées sur un axe latéral gauche.

     Toutes les tensions convergeaient vers le poumon gauche (en expir) qui sera donc considéré comme la dysfonction primordiale. Via le fascia endothoracique, ce dernier pouvait être en relation avec T10 (FRSD), puis avec L3 (FRSD) grâce au diaphragme et à ses piliers. Ces derniers pouvaient être en lien avec les psoas et la loge rénale du rein droit (médial et dorsal). Via le ligament hépatorénal, les tensions pouvaient se répercuter sur le foie (médial, crânial et dorsal). De plus, il existe un lien métamérique entre T10 et le foie. En repartant des psoas et en poursuivant avec le fascia iliaca et l’articulation ilio-sacrée, L3 pouvait être reliée au sacrum (base dorsale à gauche). Le sacrum est intimement relié à l’occiput (gauche dorsal) via les méninges et notamment la dure-mère. Ce dernier rejoint la symphyse sphéno-basillaire (torsion droite) par continuité anatomique. Le coude gauche (en inspir) quant à lui pouvait être relié au poumon via le fascia endothoracique, puis axillaire et brachial, ainsi qu’avec l’occiput par le muscle brachio-céphalique puis le triceps brachial. Enfin, la phalange 1 du doigt IV de l’antérieur gauche (rotation interne, flexion et adduction) pouvait recevoir les tensions provenant du fascia antébrachial et des gaines palmaires.

Grive (cf. figure n° 30) :

Commémoratifs et anamnèse :

     (Cf. la partie Matériel p 15). Grive est atteinte de néosporose. Sa fertilité est très faible. En revanche, elle est en lactation depuis des années sans interruption, avec un lait propre à la transformation en fromage.

Examen clinique :

     L’examen clinique n’a montré aucune anomalie particulière si ce n’est l’orientation particulière des cornes de Grive qui se retourne vers le front. Il n’y avait pas de pression mais les cornes touchaient le poil du front. De plus, une protubérance était présente sur le processus épineux de T13.

Examen ostéopathique et chaine dysfonctionnelle (cf. figure n° 29) :

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Figure n° 29 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Grive

33  34

Figure n° 30 : Photographie de Grive équipée de son harnachement complet et d’un gros plan sur l’orientation de ses cornes vers le front

     Grive présentait une chaine dysfonctionnelle plutôt superficielle latérale droite et une plus courte et plus profonde latérale gauche.

     En commençant par la chaine droite, L4 (FRSG) a été considéré comme la dysfonction primordiale, du fait de sa position assez centrale sur la chaine dysfonctionnelle sur le squelette axial et son lien avec la deuxième chaine, qui sera explicité ultérieurement. Les tensions pouvaient se redistribuer à l’ilium (droit ventral) via l’aponévrose du muscle grand dorsal et le muscle fessier moyen, puis se poursuivre via le fascia coccygien à Cd1 (FRSD). En repartant par l’avant, et toujours via le muscle grand dorsal, la L4 pouvait être en relation avec T12 (FRSG) et T7 (FRSG). Ensuite, successivement via le chef thoracique puis cervical du muscle trapèze, les tensions pouvaient remonter jusqu’à l’occiput (droit dorsal). Le muscle longissimus permettrait de transmettre les tensions de L7 à C4 (ERSD). Les frontaux (en expir) semblaient être indépendants du reste de la chaine, les deux étant touchés de façon similaire. Les cornes y étaient sans doute pour beaucoup. La pousse anormale des cornes quant à elle était peut-être due à la génétique.

Fury (cf. figure n° 32) :

Commémoratifs et anamnèse :

     (Cf. la partie Matériel p 15). Fury est, elle aussi, atteinte de néosporose. Sa fertilité est très faible et elle n’a jamais eu de veau. Fury est en surpoids estimé à 7/9.

Examen clinique :

     L’examen clinique n’a montré aucune anomalie particulière.

Examen ostéopathique et chaine dysfonctionnelle (cf. figure n°31) :

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Figure n° 31 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Fury

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Figure n° 32 : Photographie de Fury

     Les dysfonctions s’organisaient sur un axe diagonal latéral gauche.

     L’ovaire (dorsal, caudal, médial) pouvait être considéré comme la dysfonction primordiale car il était fortement fixé. En partant de l’ovaire et du mésovarium, les tensions pouvaient suivre les muscles psoas et se distribuer à L5 (FRSD et L1 (FRSG), mais aussi au côlon descendant (caudal, dorsal, médial) via son méso. Par contiguïté, le côlon pouvait conduire les tensions à l’ilium gauche (dorsal). Depuis les psoas et leur relation étroite avec les piliers du diaphragme, les tensions pouvaient cheminer le long du fascia endothoracique jusqu’à T6 (FRSG). Il existe un lien métamérique avec le réseau (caudal, dorsal et médial). Ce dernier pouvait ensuite être relié à l’occiput (gauche ventral) par le nerf vague. Enfin, l’occiput est en lien anatomique direct avec la SSB (side-bending rotation droite).

Analyse

     L’ensemble des dysfonctions ont été réparties dans un tableau selon une dichotomie réalisée par le harnachement employé. 5 bovins étaient uniquement au joug, 2 uniquement au collier. 1 animal (Moris) a essentiellement travaillé au joug mais depuis plusieurs mois il travaille très peu et plutôt au collier. Il a été comptabilisé dans les animaux travaillant au joug car le travail au collier est plutôt anecdotique. Ce sont donc les dysfonctions de 6 bovins au joug constituant le lot « joug » et de 2 bovins au collier, constituant le lot « collier » qui ont été comparées.

     D’après la biomécanique, la différence majeure entre un harnachement au joug ou au collier intervient au niveau du départ de la mise en tension, depuis le crâne et la jonction atlanto-occipitale pour le joug et depuis la scapulo-thoracique et le garrot pour le collier d’épaule. Différentes zones clés ont donc été définies pour chercher à distinguer d’éventuelles différences dans la répartition des dysfonctions : les dysfonctions crâniennes et des cervicales hautes (jusqu’à C3), et les dysfonctions de la zone du garrot (T1 à T6) et du haut du membre thoracique (de la scapulo-thoracique à la scapulo-humérale). (cf. tableau I)

Tableau I : moyennes des dysfonctions ostéopathiques selon leurs localisations dans les lots « joug » et « collier »

tableau fury

     Pour comparer les moyennes des deux lots indépendants à faible effectif, un test de Student avec une marge d’erreur de 5 % a été réalisé pour chaque zone (cf. Annexes). Il en ressort que les moyennes ne sont pas statistiquement différentes entre les deux lots pour toutes les zones étudiées.

Discussion

     La répartition des dysfonctions n’est pas statistiquement différente entre les deux lots.
     Ceci peut s’expliquer par différentes hypothèses :

  •  le nombre insuffisant des animaux testés (il y a assez peu de bovins au travail en France)
  • une non homogénéité du nombre d’animaux par lot (pour rappel, en France, une très grosse majorité des bovins de travail est au joug)
  •  il n’y a pas de différences notables au niveau ostéopathique entre des bovins travaillant au joug ou au collier
  • les animaux travaillaient soit en paire soit en solo et ceci peut avoir des répercussions ostéopathiques individuelles
  • un défaut de diagnostic de la part de l’opératrice
  • les animaux étudiés ne travaillaient pas tous beaucoup et régulièrement, sauf la paire de boeufs béarnais qui avaient un travail de formation régulier et les animaux du lot « collier ». Les dysfonctions observées n’étaient peut-être tout simplement pas  imputables au travail mais à d’autres évènements de leur vie, comme la césarienne de Fleur. Les animaux du lot « collier » étaient régulièrement montés, ce qui peut entrainer une organisation différente du schéma corporel.

     De plus, il manque dans cette étude une population de référence qui pourrait être constituée d’animaux de différents types de production ne travaillant pas. Il serait alors possible de calculer la prévalence de telle ou telle dysfonction selon le lot « joug » ou « collier » par rapport à une population de référence

     Après discussions avec les différents bouviers, il ressort que les animaux travaillant au joug nécessitent un certain nombre d’heures de travail pour apprendre à bien se placer correctement et éviter de se blesser. Le choix des animaux du lot « joug » devraient idéalement tous avoir passé ce cap de l’apprentissage pour être plus représentatifs des dysfonctions observables dans ce lot.

     Il était tout de même intéressant de noter que concernant la paire de boeufs béarnais, la différence de gabarit avait pour conséquence un défaut de positionnement de la tête pour les deux animaux et ces derniers partageaient un certain nombre de dysfonctions, un schéma global similaire, plus marqué pour le plus petit des deux. Chez Chouan, c’est la L3 et non L2 qui est ressortie de l’examen ostéopathique. Les sensibilités propres à chacun font ressortir les dysfonctions à des zones d’éventuelles fragilités antérieures à la fixation. A la différence de Martin (béarnais), Chouan présentait une dysfonction sur le foie.

     Certains des animaux étudiés étaient en surpoids et l’un deux avait présenté une fourbure quelques mois auparavant. Même si ces bovins ne sont pas destinés à la production, il ne faut pas oublier l’importance de l’adéquation de la ration alimentaire avec les besoins énergétiques de l’animal et sa qualité nutritionnelle.

 

     Les races sélectionnées aujourd’hui le sont pour une production de viande ou de lait. On ne trouve plus de race sélectionnée de nos jours avec un objectif de traction animale. Une bonne adéquation entre la morphologie de l’animal et le travail demandé serait sans doute un atout pour que le corps de l’animal soit le moins impacté. En effet, les races à viande ont évolué vers des masses musculaires impressionnantes mais les os et les tendons n’ont pas suivi et ces animaux seraient sujets à des claquages très rapidement. Les races laitières sont très grandes et plus forcément adaptées au travail. [19]

     En résumé, les consultations ostéopathiques de cette étude n’aboutissent pas à une différence notable entre les deux lots étudiés. Plusieurs hypothèses sont avancées pour expliquer ce résultat : un nombre trop restreint d’animaux et l’impossibilité de réaliser des lots homogènes en nombre ; des animaux qui ne travaillent pas régulièrement en traction ; la possibilité que le travail de traction peut aboutir à des répercutions ostéopathiques non spécifiques à tel ou tel harnachement mais qui découlent par exemple des contraintes biomécaniques du travail en paire ou en solo.

Conclusion

     La présente étude n’a pas permis de faire une distinction du point de vue ostéopathique entre le travail de traction de bovins au joug ou au collier d’épaule.

     Mais elle n’est en aucun cas un projet abouti. Il s’agit plutôt d’un travail qui permet de poser un cadre et des hypothèses à vérifier lors d’éventuels futurs travaux expérimentaux à plus grande échelle. En effet, comme écrit plus haut, le faible nombre d’animaux ne permet pas d’en faire une étude statistique suffisante.

     Dans un contexte de crise sociale et écologique, ainsi qu’une disponibilité future en énergie fossile incertaine, la traction animale connaît un regain d’intérêt. Il ne s’agit pas d’un retour en arrière mais plutôt de la fusion de savoirs du passé avec les nouvelles connaissances sur le fonctionnement de l’animal, notamment par l’ostéopathie, et la création d’outils nouveaux, plus légers, plus efficaces. L’utilisation de l’animal est parfois remise en cause, par le véganisme par exemple. Pourtant, la traction animale offre de nombreux avantages, tant pour les sols que pour l’agriculteur-trice [25], et bien formé-e-s, ces animaux et leurs bouvier-è-s pourraient apporter des solutions d’avenir. Pour ce faire, il est incontournable de connaître et de comprendre le fonctionnement et les conséquences du travail de traction sur les animaux. L’ostéopathie peut être un des leviers pour prendre soin de l’animal au travail tout comme elle l’est déjà pour les animaux de sport.

Bibliographie

[1] HAVARD M., LHOSTE P, VALL E., 2010, La diversité et le choix de l’animal de trait, La Traction animale, Quae, Versailles, 224 p, p 35

[2] HELMER D., BLAISE E., GOURICHON L., SANA SEGUI M., 2018, Using cattle for traction and transport during the Neolithic period. Contribution of the study of the first and second phalanxes, Bulletin de la Société préhistorique française, tome 115 (1), p 71-98

[3] SIGAUT F., WASSERMAN H., 1993, Le joug de cornes : une exception européenne, Jougs, contre jougs : cent jougs de provinces de France, Ecomusée de Savigny-le-Temple, 38 p, p 2, 5, 7

[4] MAZOYER M., ROUDART L., 1997, Histoire des agricultures du Monde. Du néolithique à la crise contemporaine. Le Seuil, Paris, 528 p[5] HAVARD M., LHOSTE P, VALL E., 2010, la traction animale dans le monde, La Traction animale, Quae, Versailles, 224 p, p 11, 13, 16

[6] ABOUBACAR A., Centre International Japonais de Recherche en Sciences Agricoles (JIRCAS), Etude de Développement des Oasis Sahéliennes en République du Niger (EDOS), support de formation sur les systèmes d’exhaure (pompe, motopompe, traction animale), 20 p, p 3

[7] COTI G., 22 janvier 2015, Compte-rendu des Actes du Colloque sur la traction animale bovine du 10 décembre 2014, Montmorillon, sur le blog « Attelages bovins d’aujourd’hui » de NIOULOU M. : http://attelagesbovinsdaujourdhui.unblog.fr/2015/01/22/actes-du-colloque-sur-la-traction-animale-bovine-du-10-decembre-2014-montmorillon-86-rediges-par-gerard-coti/

[8] Association Prommata, 17 juin 2015, Traction Animale Moderne et Développement durable,
https://assoprommata.org/spip.php?article230

[9] SIGAUT F., WASSERMAN H., 1993, Le joug en France (XVIIe –XXe siècle), Jougs, contre jougs : cent jougs de provinces de France, Ecomusée de Savigny-le-Temple, 38 p, p 8, 12, 13

[10] MERCIER E., consulté le 17 août 2022, dessin d’un joug de nuque, archives Larousse https://www.larousse.fr/encyclopedie/images/Joug/1001279

[11] STARKEY P., 1994, Les systèmes d’attelage courants, Systèmes d’attelage et matériels à traction animale, 278 p, p 34, 35, 36

[12] ROUANET L. 6 mai 2013, Géométrie des jougs occitans, sur le blog « Attelages bovins d’aujourd’hui » de NIOULOU M., http://attelagesbovinsdaujourdhui.unblog.fr/2013/05/06/geometrie-des-jougs-occitans-par-lionel-rouanet/

[13] MICUTA W., 1985, The Swiss collar : a harness for developing countries. Agriculture International, 37(4), p 130-135

[14] CHANCRIN E., DUMONT R. et coll., 1921, Larousse Agricole, Encyclopédie illustrée, 1ère édition, 832 p, p 44 et 45

[15] STARKEY P., Harnessing for cattle and buffaloes : options and research, in HOFFMANN, D., NARI, J., PETHERAM. R.J., 1989, Draught animals in rural development: proceedings of an international research symposium, Cipanas, Indonesia, ACIAR Proceedings n°. 27, 347 p, 286

[16] STARKEY P., 1994, Les systèmes d’attelage moins courants, Systèmes d’attelage et matériels à traction animale, 278 p, p 62, 67, 69

[17] KUHLMANN P., 2022, Débourrer et dresser, Manuel d’attelage bovin, 2ème édition, 223 p, p 166, 185

[18] HAVARD M., LHOSTE P., VALL E., 2010, La diversité et le choix de l’animale de trait, La Traction animale, Quae, Versailles, 224 p, p 46

[19] KUHLMANN P., 2022, Choisir son animal de travail, Manuel d’attelage bovin, 2ème édition, 223 p, p 31 et 33

[20] LE THIEC G., 1996, Agriculture africaine et traction animale, Montpellier, CIRAD, 375 p

[21] NIOULOU M., 01 octobre 2018, Fauchage chez Maryse et Michel Berne avec une paire de bovins, Bourg-Argental (42) sur le blog « Attelages bovins d’aujourd’hui » de NIOULOU M.
http://attelagesbovinsdaujourdhui.unblog.fr/2018/10/01/fauchage-chez-maryse-et-michel-berne-avec-une-paire-de-bovins-bourg-argental-42/

[22] DENOIX J.-M., PAILLOUX J.-P., 1997, Approche de la kinésithérapie du cheval, Maloine, 291 p

[23] KUHLMANN P., 2022, Les méthodes de harnachement pour les bovins, Manuel d’attelage bovin, 2ème édition, 223 p, p 191

[24] COLOMBO J.-C., 2012-2017, IMAOV, Présentation générale et principes fondamentaux, Ostéopathie vétérinaire, Enseignement fondamental en ostéopathie, module 1, 44 p, p 40

[25] Association Prommata, 19 août 2014, Avantages de la traction animale pour l’agriculture paysanne, https://assoprommata.org/spip.php?article73

 Listes

Figures

Figure n° 1: Une des représentations les plus anciennes d’attelage au                          joug en France : attelage de bovidés tirant un araire,                               guidé par un cultivateur, âge du Bronze ancien, gravures                           rupestres du Mont-Bégo (Saint-Dalmas-de-Tende, Alpes                             Maritimes, 1900 av. J-C) [3]
Figure n° 2 : Graphique comparant les utilisations des différentes                                 formes d’énergie, dans les pays en développement et dans                         les pays développés [5]
Figure n° 3 : Illustration d’un joug de tête reposant sur la nuque [10]
Figure n° 4 : Illustration d’un joug occitan vu de face [12]
Figure n° 5 : Illustration de la capière droite d’un joug vu de dessous et                       de derrière montrant la zone d’appui sur la nuque [12]
Figure n° 6 : Illustration de la capière droite d’un joug vu de face                                 montrant la zone d’appui des cornes et les zones où elles                           ne doivent pas porter [12]
Figure n° 7 : Illustration d’un joug vu de dessus montrant le galbe dans                       le plan frontal [12]
Figure n° 8 : Illustration d’une paire de bovins attelés au joug vu de                             dessus montrant le galbe dans le plan frontal et montrant                           la projection des trajectoires de chaque animal [12]
Figure n° 9 : joug vu de face montrant le galbe dans le plan transversal,                       la courbure étant exagérée ici [12]
Figure n° 10 : Illustration du collier de Berne en place sur un bovin [16]
Figure n° 11 : Illustrations du collier simplifié, seul et en place sur un                            bovin [16]
Figure n° 12 : Schéma des différentes forces en traction animale et de                            l’angle de traction [20]
Figure n° 13 : Illustration montrant l’impact de l’angle de traction sur                          les forces s’appliquant à l’animal [20]
Figure n° 14 : Photographie montrant une contrainte de la position de                           la tête, ici en rotation droite, imposée par le joug lors                                d’un travail en dénivelé [21]
Figure n° 15 : Schéma de la mise en tension de l’animal dans le cas                              d’un travail au joug (dessin personnel inspiré en partie de                        [22])
Figure n° 16 : Schéma de la mise en tension de l’animal dans le cas                              d’un travail au collier d’épaule (dessin personnel inspiré                          en partie de [22])
Figure n° 17 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Martin                              (béarnais)
Figure n° 18 : Photographie de Martin (béarnais)
Figure n° 19 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Chouan
Figure n° 20 : Photographie de Chouan
Figure n° 21 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Martin                               (bordelais)
Figure n° 22 : Photographie de Martin (bordelais)
Figure n° 23 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Moris
Figure n° 24 : Photographies de Moris et de l’orientation de ses cornes
Figure n° 25 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Fleur
Figure n° 26 : Photographie de Fleur
Figure n° 27 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Plume
Figure n° 28 : Photographie de Plume
Figure n° 29 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Grive
Figure n° 30 : Photographie de Grive équipée de son harnachement                              complet et d’un gros plan sur l’orientation de ses cornes                            vers le front
Figure n° 31 : Schéma des dysfonctions diagnostiquées chez Fury
Figure n° 32 : Photographie de Fury

Tableau

Tableau I : moyennes des dysfonctions ostéopathiques selon leurs localisations dans les lots « joug » et « collier »
Abréviations
    FAO : Food and Agriculture Organization of the United Nations,               l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture         en français
    MRP : Mouvement Respiratoire Primaire
    C1, C2, … : cervicale 1, cervicale 2, …
    T1, T2, … : thoracique 1, thoracique 1, …
    L1, L2, … : lombaire 1, lombaire 2, …
    Cd1 : caudale 1
    FRSD ou G : vertèbre en flexion rotation sidebending droite ou                 gauche, les facettes articulaires sont engagées
    ERSD ou G : vertèbre en extension rotation sidebending droite ou             gauche, les facettes articulaires sont engagées
    Côlon desc. : côlon descendant
    SSB : Symphyse sphéno-basillaire

Annexes

  Test de Student : test statistique permettant de comparer les moyennes d’un échantillon par rapport à une valeur de référence ou, comme ici, entre deux échantillons, pour établir si les moyennes sont statistiquement différentes ou non. Ce test offre la possibilité de traiter avec de petits effectifs :

 test student

 

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Jean Pierre Brun, Beaucaire (30)

Jean Pierre Brun habite sur Beaucaire (30). Il nous présente son travail et son projet avec les bovins.
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Depuis deux ans je suis en dressage de deux bœufs Portugais de race Mertolenga. C’est une race qui est élevée en Camargue habituée à la chaleur et aux moustiques.
Je les ai achetés à 6 mois. naisseur Ganaderia FANO sur Miramas (éleveurs de toros de combat).
Je me suis donné le défi pour occuper mon temps lors de mon départ à la retraite.
j’attelle aussi une paire de chevaux de race cob normand et une paire de mules du Poitou.
Fils d’agriculteur, j’ai réalisé ma carrière professionnelle dans la chaudronnerie. Mais ma passion est l’attelage.
Pour l’instant j’ai un vieux joug plat le temps de la croissance.
Par la suite, j’envisage d’en réaliser un sur mesure.
Jean Pierre Brun

Traction bovine au Château Corbin Michotte, Maison Boidron

Au Château Corbin Michotte, Saint-Emilion Grand Cru, la Maison Boidron remet en pratique depuis 3 ans le travail des vignes avec des bœufs de traction.

SAISON 2022 DE LA FERME À L’ANCIENNE CHEZ MARYSE ET MICHEL BERNE, BOURG ARGENTAL (42)

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La ferme à l’ancienne ouvrira les portes de son musée cette année: 

  •     Du 10 juillet au 10 août tous les jours sauf dimanches, de 15h00 à17h30
  •     Du 20 août au 5 septembre tous les jours sauf dimanches, de 15h00 à17h30

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