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Vidéo de louis GUIRAL Jougatier de Salles-Curan (12)

Voir le site « Occitan Aveyron » en cliquant ici.

Il y avait toutes sortes de petits métiers sédentaires ou ambulants comme le cordonnier appelé sudre ou pegòt, l’esclopièr (sabotier), lo jotièr (jougtier), lo barricaire (tonnelier), l’estamaire (étameur), l’amolaire, ganha-petit ou agusaire (rémouleur), le tailleur appelé sartre, lo cadièiraire (fabricant de chaises), lo candelaire (fabricant de chandelles), lo matalassièr ou matalassaire (fabricant de matelas), lo pelharòt ou pelhaire (chiffonnier)…

Pour fabriquer les jougs, on faisait appel à un jougtier : lo jotièr.

Habituellement, le jougtier venait sur place pour fabriquer les jougs sur mesure. Il fallait tenir compte de la taille des bêtes (bœufs ou vaches) ainsi que de leur morphologie.

La redonda est l’anneau, maintenu par une cheville (cavilha, ataladoira), qui reçoit le bout du timon (pèrga). Littéralement, redonda signifie ronde.

Las julhas sont les longes de cuir qui permettaient d’attacher le joug sur la tête des bêtes.

Le jougatier, fabricant de joug, article patrimoine sur le site Millavois.com

article jougatier millavois

Lionel Rouanet nous fait passer le lien de cet article consacré à un ancien fabricant de jougs Monsieur Louis Guiral de Bouloc à Salles-Curan (12).

Il vient de paraître sur le site Millavois.com.

Cliquez ici pour voir.

Merci à Lionel pour son envoi.

Patrimoine. Ces métiers disparus : le jougatier

Marc Parguel

Lecture 6 min.
A La Roque-Sainte-Marguerite, vers 1920.

Jougatier : fabricant de jougs. Un joug est une pièce de bois qui lie les animaux côte à côte.

Sait-on encore ce qu’est ou plutôt ce qu’était, un « jougatier » ? Le mot ne figure ni sur le Larousse ni sur le Petit Robert. Il serait certainement refusé au jeu des Chiffres et des Lettres.

C’est en effet un métier qui a presque totalement disparu puisque le jougatier était l’artisan qui fabriquait les jougs. Métier dont l’origine se perd dans la nuit des temps, mais qui n’existe plus depuis que le bœufs, trop lent pour notre siècle de vitesse, a fait place au tracteur.

jougatier 02Le plus ancien système serait le joug à cornes où une barre en bois était placée entre les cornes d’un bovidé.

J’ai eu pourtant le plaisir de rencontrer tout récemment un des derniers jougatiers de notre région, Monsieur Louis Guiral, de Bouloc. C’est lui qui a sculpté les derniers jougs dont nous avons eu besoin pour notre petite propriété de l’Hospitalet.

Accompagnée de mon fils j’ai passé l’après-midi chez lui ; et là, dans la bonne chaleur de sa cuisine- il faisait très froid dehors- il nous a parlé de son métier.

Ce métier, il l’a appris simplement en regardant travailler un autre jougatier. Pas besoin, à cette époque, d’un C.A.P. Mais il devait tenir de son père une aptitude particulière à ce travail, ce dernier, simple paysan, exécutant de remarquables sculptures sur bois.

Ses outils n’avaient rien de compliquer : la hache, l’herminette (hache à tranchant recourbé), la plane (lame tranchante à deux poignées) et une vrille ou tarière.

jougatier 03Labour d’automne (1922).

Les jougatiers étaient peu nombreux ; aussi leur activité s’exerçait parfois loin de chez eux. De Bouloc, où ils étaient deux, ils venaient jusqu’au Larzac, au causse Noir ou sur les terres de Saint-Affrique. Ils suivaient les foires de la région, rencontrant aussi leurs clients, et fixaient ensemble un jour déterminé. Monsieur Guiral se rendait à son travail à bicyclette. Venir de Bouloc à l’Hospitalet représentait un bon exercice ! Aussi tâchait-il de grouper ses commandes. En été, profitant au maximum de la durée du jour, il pouvait faire deux jougs dans la même journée. Il se rappelle avoir fait à l’Hospitalet onze jougs en une seule semaine.

Le premier travail était de choisir le bois. Il fallait une bille d’environ 1,40 m sur 0,50 de diamètre. Sur notre plateau, c’était le plus souvent de l’ormeau ou du frêne.

Ailleurs, c’était du hêtre ou même du noyer. Il lui est arrivé, sur le causse Noir, et à contrecœur, d’avoir utilisé du pin. L’essentiel était que le bois fût vert car il était plus facile à travailler. Parfois, il allait choisir lui-même l’arbre à couper.

Les deux bœufs étaient alors amenés et placés côte à côte, comme ils devaient être bons à l’attelage. Le jougatier après avoir dégrossi le bois à la hache procédait à des essayages. Travail délicat : le joug ne doit pas blesser la bête ; il doit s’adapter à la forme des cornes, particulières à chaque bœuf.

jougatier 04Bœufs sous le joug.

C’est en effet aux cornes que sera lié le joug à l’aide de deux longues courroies, les « juilles ». Le joug doit être très légèrement arqué- c’est imperceptible à l’œil non averti, pour que chaque bœuf, ayant la tête légèrement tournée vers le centre, puisse voir son compagnon de travail. Ainsi, après des essais de fines retouches, un polissage le joug est terminé. Alors le jougatier le signait à l’aide d’un poinçon à son nom, imprimé par un bon coup de marteau. Ultime travail : il allumait un feu de branches et d’éclats et passait rapidement le joug à travers la flamme afin de durcir le bois trop vert.

Dans le Languedoc le travail de la vigne s’effectuait avec des chevaux. Mais pendant la cruelle période de 1940 à 1945, la nourriture des chevaux devint si difficile à assurer que certains propriétaires ont eu recours au bœuf, plus rustique que le cheval- pour labourer les vignes. Il a donc fallu sculpter des jougs pour un seul animal. C’est ainsi que Monsieur Guiral nous a fait deux jougs pour les bœufs que nous avons utilisés sur quelques vignes du Midi. L’autre jour il nous rappelait qu’il avait même imaginé, à la demande d’un ami, un joug très large, permettant aux bœufs d’avancer dans la vigne, séparés par une rangée de souches. C’est le principe adapté plus tard par le tracteur-vigneron.

Le jougatier était reçu cordialement par le propriétaire chez qui lui venait travailler. Il y trouvait toujours le gîte et le couvert. Et quand il était d’humeur joyeuse, il chantait.

Texte de Marthe Bergonier,
paru dans la revue « Le Caussenard » n°16,
janvier-février mars 1986 »

Projet d’ouvrage sur les jougs de France, appel à contribution, par Philippe Berte-Langereau

joug appel

Philippe Berte-Langereau est un grand connaisseur du monde des attelages bovins. Il a en particulier beaucoup travaillé dans un cadre associatif, sur les attelages de sa région du Morvan 

Il se propose de faire un travail sur les jougs de France. Mais a besoin de la collaboration de tous.

Si déjà chaque lecteur du blog « Attelages Bovins d’Aujourd’hui » communique des photos, des informations sur les jougs qu’il utilise s’il est bouvier, ou sur les jougs qu’il connaît s’il est simple possesseur de joug, une masse considérable de données pourraient rapidement être collectées. Nous comptons sur vous ou sur votre réseau de connaissances.

Ce travail, en le menant à son terme, serait d’un intérêt ethnographique majeur.

Ne craignez pas de prendre contact avec Philippe dont les coordonnées sont notées à la fin de l’appel pour voir avec lui comment procéder simplement. 

Faites tournez l’infos dans vos carnets d’adresses et sur vos réseaux sociaux.

Merci, on compte sur vous!!!

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Propositions concernant les jougs (bœufs, vaches, mules, etc…)

Un constat s’impose : il n’a jamais rien été publié sur le joug sur l’ensemble du territoire français, territoires d’Outre-Mer compris. Les travaux de M. Juston, de Mme Jean-Brunhes Delamarre ou d’autres dans des monographies régionales, sont des ébauches de ce qui pourrait être plus complet, et surtout synthétique pour une vision d’ensemble et comparative comme cela a été fait pour le Portugal, par exemple, avec les travaux très fournis de F. Galhano et de B. Pereira.

C’est d’autant plus dommage que la France a connu une très belle variété de jougs et surtout d’attelages joug/timon avec la richesse linguistique qui va avec. C’est aussi dommage pour celles et ceux qui, depuis quelques années, s’intéressent à ces pratiques, dressent, fabriquent, taillent pour des attelages d’aujourd’hui.

Michel Nioulou a eu l’extraordinaire initiative de créer un blog que beaucoup connaissent aujourd’hui et qui permet un lien moderne entre les personnes que ces techniques intéressent.

Nous en avons parlé. Il s’avère que ce blog permet de lancer la présente proposition : motiver une équipe de personnes pour un travail collectif. Chacun(e) dans sa région ou son secteur pourrait se donner pour objectif d’étudier les jougs et les techniques qui vont avec dans ce secteur bien délimité.

Un premier jet de plan pourrait être le suivant :

  • Le joug, pièce de bois (essences de bois utilisées, formes, etc….).
  • Les différentes parties du joug avec terminologie locale.
  •  Le système d’attache au timon avec terminologie.
  • Les jougs particuliers : extensibles pour la vigne ou le maïs, à trois têtes, à une tête, etc…
  • Les accessoires du joug, coussins de cuir, de paille, de jonc, les lanières, etc…
  • La fabrication d’un joug et ses étapes.
  • La décoration (sur-jougs, peintures, tailles du bois au ciseau, etc…).
  • Le travail avec les bêtes, le dressage, la conduite, les races de travail, etc…
  • Les fabricants de jougs connus.

Il faudrait que ceci soit accompagné de photos anciennes et contemporaines, de cartes postales anciennes, de croquis, de dessins, de textes précis tout en restant techniquement accessibles.

Par ailleurs, pour les personnes qui ne souhaitent pas s’investir trop lourdement, elles peuvent envoyer une ou des photos d’un ou plusieurs jougs en leur possession. Ceci en donnant quelques précisions si elles les ont : dimensions, essence de bois, noms des parties du joug, fabricant quand il est connu, région précise d’utilisation.

Je me propose d’en être le coordonnateur et, bien sûr, nous sommes ouverts à d’autres suggestions, compléments, etc… A partir du moment où une équipe se sera constituée, il faudrait travailler avec des dates butoirs. C’est le plus efficace. Quand c’est possible, il faudrait proposer une collaboration avec des musées régionaux qui ont souvent une collection de jougs plus ou moins importante (comme à Villard-de-Lans par exemple, dans le Vercors).

Enfin, cela pourrait déboucher sur une publication (par souscription par exemple).

Pour me contacter :

 6 joug de montagne de la loire philippe Gaillat (159) logo

Fernand BORDAGE “Toucheur” de bœufs, article du site « Au fil du temps » sur l’histoire de Bournezeau (85)

 

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Retrouvez  en cliquant ici  un très bel article sur Fernand Bordage, ancien bouvier Vendéen.  ces propos sont issus du journal “Vendée Matin” du 18 octobre 1989 et dans la revue de Radio Alouette “La fin de la Rabinaïe”
Témoignages : Yvette Guigné/Bordage, Patrick Guigné.

Pdf de l’article en cliquant ci-après article-au-fil-du-temps-bournezeau

bordage 2

Voici l’article : 

Fernand BORDAGE “Toucheur” de bœufs

Fernand, agriculteur au village des Brosses à Saint-Vincent-Puymaufrais, a cessé son activité le 1er novembre 1989. C’est une page qui se tournait pour cet éleveur qui avait la passion des animaux et des attelages de bœufs. Il était l’un des derniers toucheurs de bœufs de la région. Fernand est maintenant rentré dans l’histoire. Nous rappelons un peu la vie de ce paysan traditionnel qui a marqué la population locale. Fernand Bordage est né le 3 février 1932 à Villeneuve de Bournezeau. Son frère jumeau s’appelle René. Sa sœur Yvette est née en 1933.

Fernand Bordage vers 1955

Ses parents : Églantine Rattier née en 1911, Fernand Bordage né en 1907, ont vécu, à l’époque après leur mariage en 1931, à Villeneuve, avant de s’installer dans une ferme à la Boule, puis en 1939, à la ferme des Brosses de Saint-Vincent-Puymaufrais

Lieu historique : Les Brosses

La ferme est au cœur d’une région connue et célèbre du temps des Guerres de Vendée, comme le décrit avec beaucoup de chaleur Henri de Villedieu de la Réorthe, une région qui était contrôlée au début de l’insurrection de 1793 par Gaspard de Béjarry et ses 400 hommes. Elle faisait partie de Saint-Vincent-Fort-du-Lay, fusionné depuis 1833 avec Saint-Vincent-Puymaufrais.

La ferme est appelée les Brosses. Maurice Bedon, l’historien chantonnaysien rappelle qu’elle a été le théâtre d’un combat à la fin des Guerres de Vendée. Le 1er ventôse de l’an IV (20 février 1796), quatre officiers vendéens étaient dans une métairie. Trahis, puis encerclés, trois réussirent à s’échapper, le quatrième combattit jusqu’à ce qu’il tombe de quinze balles. La ferme des Brosses, vendue comme bien national, a été rachetée par la même famille Béjarry qui en avait été dépossédée le 7 février 1799.

Lieu-dit Les Brosses en 2013

Comme autrefois, la polyculture

Ce petit coin de la Vendée profonde et pittoresque va perdre de son charme et de son originalité avec le départ de cette famille d’agriculteurs “à l’ancienne mode” au sens noble de l’expression.

Églantine et son mari Fernand se sont donc installés en 1939, avec leurs trois enfants, à la ferme des Brosses. Comme tous les enfants des villages, Fernand, René et Yvette allaient à l’école à pied, tout d’abord à la Réorthe, puis à l’école de l’Augoire. René et Yvette ont quitté le domicile familial à leur mariage. Églantine devint veuve en 1968. Elle resta donc avec son fils Fernand, célibataire.

Patrick Guigné, petit-fils d’Églantine et neveu de Fernand, a travaillé à la ferme de 1981 à 1989. Après son mariage, il a quitté Les Brosses, pour aller travailler à la Gaubretière. Dès l’âge de 9/10.ans, Patrick allait déjà aider Fernand, le mercredi, le samedi et quand il n’y avait pas d’école.

Les 4 bœufs de Fernand
attelés à la vanneuse lors d’une fête de battage.

Ils ont cultivé avec amour cette terre de 47 ha à l’exemple de leurs ainés, défiant le progrès et l’aventure. Comme autrefois, ils ont fait de la polyculture : betterave, blé, chou, maïs, foin, luzerne, un peu de tout et de l’élevage de charolais. En 1988 il y avait soixante-dix têtes de bétail. Ils avaient également des chevaux : deux juments poulinières et un poulain.

Églantine Bordage élevait cochons, poulets, lapins, comme au bon vieux temps. Leur principe : vivre tranquille, sans emprunt, achetant quand l’argent était là.

Pour leur retraite, Fernand et sa mère avaient, depuis quelques années déjà, acheté, entretenu et amélioré une maison à Bournezeau.

Boeufs Bordage 5
Deux bœufs de Fernand
attelés sur un tonneau un jour de fête

Dresser les bœufs

Fernand Bordage avec deux bœufs
aux Brosses en mai 1988.

Il n’y a pas de durée fixe pour dresser les bœufs. Certains, après trois sorties sous le joug, marchent très bien… D’autres, au bout d’un an, seront aussi bêtes que la première fois  Il est nécessaire de lier d’abord un jeune bœuf avec un vieil habitué au joug. C’est comme un gosse pour l’apprendre à marcher, on le tient par la main.Après un temps d’apprentissage, plus ou moins long, on lie les jeunes ensemble et on les attache à un arbre.

Il faut les surveiller, et ils connaissent leur homme. Un jour, pendant que je coupais des choux, mon neveu a voulu détacher les bœufs. Ils sont partis comme des fous en courant, ont sauté les clôtures, se sont arrêtés à un buisson de houx après bien des dégâts

Une autre fois, un jeune homme a voulu voir, par dessus la haie, mes bœufs attelés à une charrette. Ils ont pris peur, ils sont très peureux, ils se sont emballés en traînant la charrette. Quelle course épouvantable, je criais : tot é perdu, tot é perdu ».Fernand, après avoir traversé les champs en courant, a réussi, après plusieurs kilomètres, à se trouver devant pour les arrêter.

Tous les ans Fernand vendait deux bœufs gras et en dressait deux autres pour assurer la relève .

Fernand conduit ses quatre bœufs et sa jument pour tirer la vanneuse un jour de battage.

Toucher les bœufs

Conduire des bœufs est un art :

« Avec certains  “boués”, des bœufs démarrent et marchent au commandement. Avec d’autres ils ne bougent pas. Faut savoir leur parler. Souvent, je leur parle, pour eux je chante. Ils connaissent leur maître, sa voix, son odeur. Faut de la douceur, de la patience ».Il y a une manière de les piquer, avec la pointe au bout de l’aiguillon : « Si vous appuyez ferme, vous crevez la peau. Faut avoir du doigté. Moi, je n’ai jamais fait saigner mes bœufs ».et Fernand conclut avec un brin de nostalgie « Dans les fermes, l’amour des bêtes c’est fini. Aujourd’hui on préfère entendre “péter” les tracteurs. »

Des bœufs pour le travail et pour la fête :

Pour ses bœufs, Fernand avait de l’admiration et de l’affection. Il en parlait avec de l’émotion dans la voix. À eux, il a parlé, chanté.

«À cinq ans, j’ai commencé à garder les vaches du matin au soir »nous dit Fernand, « en partant vers 10 heures, rentrant le soir vers 6 heures, quant on venait me chercher. C’était dur »

Le père et le fils Bordage au labour

A 7 ans, il “touchait” (conduisait) déjà les bœufs, On disait que j’étais un bon boué » (bouvier)

Il a toujours conservé des bœufs. Non pas qu’il fut réfractaire au progrès mécanique : depuis 1956, il possédait un solide tracteur. Mais les bœufs étaient pour lui de précieux compagnons,l’hiver, pour charroyer choux et betteraves, et l’été, depuis 15 ans, pour aller aux fêtes »

De cette participation aux fêtes, il en parle avec enthousiasme. Dans tout l’ouest, chaque été pendant trois mois, il conduisait son attelage de six bœufs précédés de sa jument, pour déplacer la machine à battre sous les applaudissements des foules, ou pour labourer.

Il est allé dans les Deux-Sèvres, le Finistère, les Côtes-du-Nord, le Maine-et-Loire, un calendrier très chargé l’accaparant tous les dimanches. Sa dernière sortie c’était le 3 septembre 1989,près d’Angers.« C’étaient de grosses journées. Dès que les bêtes descendaient du camion, je les lavais…Car, quand elles sont sales, ça ne présente pas ».

Toute sa vie, Fernand a élevé aussi des juments. Les dernières, c’étaient “Paulette” une forte jument poulinière de 8 ans, mélange de race percheronne et bretonne, et “Rainette>”, une jeune pouliche.« En 1940, puis pendant toute l’occupation, mon père a fait saillir sa jument pour éviter la réquisition par les Allemands. Depuis, j’ai toujours eu des poulains. »>A la fin de son activité, deux bœufs “Bas Blanc, Roquet” sont partis à Bordeaux pour la viande. Les deux autres paires, “Viens-tu, Trinquet”et “Capricieux, Charlatan” ont été vendues à Denis Bonnin de la Chaize-le-Vicomte, un collègue voisin qui assurait aussi des fêtes de labours

Le départ des Brosses

C’est après 50 ans de labeur fécond et généreux, que Fernand et sa mère ont quitté la ferme des Brosses pour raison de santé, cette ferme. à laquelle ils étaient très attachés, comme à leur propre bien, appartenant à Michel de Béjarry. Églantine avait 78 ans, Fernand 57 ans. Pour Fernand, ce fut un déchirement : La ferme n’était-elle pas toute son histoire d’homme ? Les terres ont été attribuées à une exploitation voisine : aux frères Perrocheau de la Fouquetterie.

Fernand et Églantine s’installèrent donc dans leur maison, rue de la Végo à Bournezeau., ils méritaient bien leur retraite. Églantine est décédée le 10 janvier 1994, Fernand s’est marié en mai 1995 avec Marie-Thérèse Péaud. Il est décédé le 5 avril 2001.

Grange et écuries des Brosses en 2013

Églantine et Fernand étaient connus dans nos communes. C’étaient des personnages, qui ont marqué les habitants de la commune et dont les noms resteront à jamais gravés dans la mémoire de leurs proches.

Louisette Lemoullec

Propos recueillis dans le journal “Vendée Matin” du 18 octobre 1989.
et dans la revue de Radio Alouette “La fin de la Rabinaïe”
Témoignages : Yvette Guigné/Bordage, Patrick Guigné

Revue « Vie à la campagne » n°129 année 1912

Couverture de Vie à la Campagne, vol. XI, n° 129 du 1er février 1912. retravaillé

Le choix du mode d’attelage des bovins, joug, jouguet, joug de garrot, joug du massif central, des Vosges, d’ailleurs…..le mieux, le pire, le parfait…. un questionnement de toujours!!! 1912

Moisson avec un bœuf vosgien et le vallus, Fête de Grannos, 11 au 18 Août 2019, par Emmanuel Fleurentdidier

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Une grande première depuis plus de deux mille ans. C’est au mois d’Août qu’ont lieu les fêtes de Grannos chez les Lemovices, peuple gaulois du Limousin, sur l’oppidum de Coriobona dans la vallée de l’Issoire.

Coriobona est un village reconstitué, grandeur nature avec une ferme aristocratique fortifiée, où l’on peut découvrir la vie au quotidien des Gaulois lors du I er siècle avant J.-C., celle de l’artisanat, des guerriers et des marchands (Cliquez ici pour voir). C’est avec leur chef Eporenos (Monsieur Boos Patrick) restituteur et de toute la troupe des Gaulois d’Esse que va se dérouler la moisson.

Ce n’est pas la première fois que j’interviens sur ce site puisqu’en automne 2017 avec Solène Gaudin nous avons participé au tournage d’un documentaire « Le vrai visage des Gaulois », où nous avions réalisé un labour à l’araire gauloise, avec deux bœufs vosgiens.

labour

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Cette fois-ci,  il s’agit de la moisson avec le vallus, la moissonneuse gauloise, dont la représentation a été trouvée en Gaule Belge.

vallus

C’est une première pour cette reconstitution avec un bœuf vosgien.

tino

D’autres essais avaient été réalisés avec un cheval ou un âne et même avec des hommes. La réalisation de la moissonneuse n’est pas seulement du folklore « à la gauloise » pour le grand public venu passer la journée sur ce site, mais c’est surtout une restitution  grandeur réelle avec deux archéologues, Sammy Benmakhad  doctorant archéo-agronome, et Stéphane Gaudefroy,  de l’INRAP et céramologue, venus pour l’occasion.

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Le vallus a été réalisé par Patrick Boos d’après des sculptures, et de deux textes antiques de Pline et de Columelle.

Le vallus est tout en bois:  c’est une caisse avec, à l’avant, un peigne qui vient cueillir les épis d’épeautre, et à l’arrière des brancards dans lesquels on vient loger le bœuf. Ce vallus est connu par les Gaulois dans le nord de la France, en Belgique, et en Allemagne, lieu de grandes cultures où l’on cultive l’épeautre et le millet.

Paradoxalement, c‘est une machine tractée, mais où  « l’outil » est devant le boeuf.

vallus et le boeuf

A l’arrière, un homme qui tient  le vallus  règle la hauteur de coupe. A l’avant, un homme rabat les épis vers le peigne.

Cette moisson va se faire avec Tino, bœuf vosgien de quatre ans, dressé au menage en solo par l’arrière. Là, on n’a pas mis la charrue avant le bœuf, mais le vallus.

Il a donc fallu apprendre à Tino à tirer pour pousser l’outil. Lors de la préparation et pour la présentation,  je suis aidé par Emile qui sera à la manœuvre du vallus mais aussi par Elian qui sera rabatteur.

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 Tino est un bœuf qui apprend vite même si la manœuvre est délicate pour lui.

Il faut qu’il tire le vallus pour qu’il avance, qu’il apprenne à le faire tourner et à faire demi-tour sur place. Pour cela, on a fabriqué un vallus d’entraînement, un essieu, une caisse, et des brancards. Le valllus doit être équilibré car le bœuf tire et Emile doit tenir les brancards pour tenir la direction mais n’avoir aucun poids à porter. Tino pousse bien l’outil, il faut maintenant le faire tourner, ce qu’il réalise assez bien, puis faire demi-tour sur place. Après une heure d’entraînement, on sait que Tino va pouvoir réaliser la moisson.

 entrainement

Fin Juillet, Emile, Tino et moi nous nous rendons à l’oppidum de Coriobona, où nous  retrouvons Patrick Boos qui va nous montrer le vallus avec lequel nous allons travailler. On garnit Tino puis on le met dans les brancards. C’est Patrick qui se place à l’arrière pour la direction, puis l’on fait marcher Tino. Il effectue des lignes droites et des demi-tours. Tout se passe comme à l’entraînement.

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Nous sommes prêts pour la moisson.

Enfin, les grands jours arrivent, les visiteurs sont là en nombre et certains sont venus spécialement pour voir un bœuf travailler, suite à l’annonce faite sur le blog de Michel Nioulou : « Attelages Bovins d’aujourd’hui ».

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Après la présentation du vallus et de Tino dans l’hémicycle du village, on se rend dans le champ où l’on doit moissonner l’épeautre, accompagnés des Gaulois du village et des archéologues.

C’est un grand moment de l’Histoire que l’on va reconstituer, avec des gestes autrefois quotidiens que l’on va réaliser dans l’idée de les redécouvrir. Tino est prêt, tout le monde attend ses premiers pas dans le champs. C’est parti, Tino pousse ou tire et Patrick rabat les épis vers le peigne du vallus. Les premiers épis tombent dans la caisse. Le vallus fonctionne, la moisson se déroule comme il y a deux mille ans. On peut voir la satisfaction des reconstituteurs,  des Gaulois d’Esse, des archéologues, et de Patrick qui a fabriqué le vallus, des bouviers, qui ont tous le sentiment de vivre une grande première.

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Maintenant que l’on sait que ça marche, cette reconstitution permet aussi de faire quelques modifications sur le vallus afin d’améliorer la récolte mais c’est aussi ce qu’ont dû faire les Gaulois de l’époque.

Ces journées étaient plus que de la simple démonstration, elles vont permettre de continuer les recherches et les études à venir, montrer au public le travail de la traction bovine, expliquer le futur à travers le passé. Mais nous sommes « aujourd’hui » , au temps où l’on se pose toutes ces questions sur notre avenir, notre agriculture, nos énergies, nos sols, mais aussi sur notre travail avec les animaux….

La moisson se termine sous les applaudissements du public! Alors merci à tous ces gens d’être venus redécouvrir notre passé, merci à Patrick Boos, aux Gaulois d’Esse, aux archéologues. Merci à Solène Gaudin pour son travail en amont, à Michel Nioulou pour son blog qui aide à communique. Merci à Tino, premier bœuf à pousser le vallus depuis deux mille ans. Un grand merci à Emile  et Elian pour les heures de préparation de dressage. Comme toujours chez les Gaulois, c’est avec un banquet que s’achève la fête de Grannos.

Emmanuel Fleurentdidier

Bosognatos «  celui qui connaît les bœufs »

Contact :

les Gaulois d’Esse, le pont Binot, 16 500 ESSSE

lesgauloisdesse@free.fr

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Création de l’association Violette et François JUSTON, archives autour des attelages de bovins

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« Quand la corne arrachait tout » couverture de la première édition

Elvire Caspar nous communique ce texte au sujet de la création d’une association autour de l’oeuvre de François Juston son grand-père.

Il a beaucoup milité pour les attelages de boeufs et a en particulier écrit un ouvrage de référence: « Quand la corne arrachait tout ».

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François JUSTON, connu pour son ouvrage « Quand la corne arrachait tout », édité en 1994, a mené les bœufs dans la ferme familiale en Ardèche (Saint Maurice en Chalençon) jusqu’à 40 ans. Puis la vie l’a poussé à travailler comme salarié dans une autre exploitation, où l’unique vache servait à donner du lait et un veau de temps en temps, mais pas le temps pour l’attelage…

Toutefois, passionné qu’il était, il n’a jamais cessé de participer aux recherches sur l’attelage bovin, tant sur son histoire que sur son présent et son avenir. Une partie de la collection d’images et de textes qu’il a accumulée est aujourd’hui conservée au Musée national des arts et traditions populaires (13). L’autre partie est chez nous, sa famille.

Ce petit encart a pour but de vous faire savoir que Nelly et Lydie JUSTON, ses filles, et moi-même, sa petite fille, avons créé l’association Violette et François JUSTON (sans le soutien de sa femme Violette, François n’aurait pas été aussi loin dans ses recherches).

Son objectif est de protéger, promouvoir et diffuser ces ouvrages, en commençant par rééditer Quand la corne arrachait tout, épuisé très rapidement lors de sa parution.

Si vous souhaitez faire partie des premiers soutiens de cette association qui a beaucoup de travail devant elle, vous pouvez adhérer en envoyant un chèque (à l’ordre de l’Association Violette et François JUSTON), à l’adresse en fin d’article, la cotisation étant de 5 euros.

Et si vous souhaitez faire partie des futurs soutiens, vous pourrez acheter le livre réédité courant 2020 (si tout se passe bien !).

 

Elvire CASPAR

Association Violette et François JUSTON

Logement communal

65240 ARDENGOST

06 03 94 77 37

asso.vfjuston@laposte.net

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Extrait de Quand la corne arrachait tout :

 

A titre d’introduction :

                        La plume et l’aiguillon.

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            Ce recueil d’un savoir complexe et mouvant, en voie de très proche disparition, est inséparable de la vie de son auteur. François JUSTON se présente lui-même.

 

            Un dur chemin.

 

            « Né le 4 août 1920, aîné de famille nombreuse, Ardéchois par mon père, Cévenol et Alsacien par ma mère, j’aime fidèlement le Massif Central, ses aspects, son histoire, les traces et souvenirs du métier exigeant de bouvier.

            Ainsi que beaucoup d’autres, à première vue moins bien placés, j’ai dû quitter en janvier 1960, net d’emprunts et amélioré, le bien familial, acquis voici fort longtemps par mon trisaïeul Mathieu Juston, dit le Cadet, le 9 ventôse, an XIII.

            Je n’ai servi que trois employeurs de l’enfance à la soixantaine : mon père en Ardèche ; un aviculteur-accouveur près de Valence ; et enfin une grosse société avicole près de Romans. Pour un homme atteint dans son corps par des sciatiques répétées pendant vingt-quatre ans, passer du bétail inscrit ou réputé… au poussin anonyme qui reflue par vagues et par milliers, passer de l’attelage heureux, fier et personnalisé… à la pintade bruyante et brise-tout, ce fut un crève-coeur accompagné de bien d’autres découvertes.

 

            Bouvier toujours.

 

            Sans négliger mon gagne-pain et d’autres activités culturelles, le bouvier recyclé que j’étais a trouvé des interlocuteurs, des amis, des correspondants. Des gens de tous horizons : fermiers, éleveurs, techniciens, vétérinaires, bibliothécaires. Pourquoi un tel acharnement ? Voici des éléments de réponse.

            La bibliothèque agricole de mon grand-père maternel – très érudit – et ses souvenirs de l’Italie Centrale avaient constitué pour moi un premier ferment du besoin d’apprendre. J’ai ensuite engrangé des observations faites sous l’uniforme des troupes alpines en Piémont, Alsace, Bavière et Autriche. S’y rajoutent les souvenirs de quatre années très dures de sécheresse, durant l’Occupation. Enfin, mes réflexions sur les incohérences multiples de l’élevage bovin dans le Massif Central et le maigre apport de la documentation agricole dans la période 1880-1945.

            Un tel foisonnement de sources contradictoires ne m’a pas rebuté. Je me suis peu à peu orienté vers l’étude de populations bovines traditionnelles ou négligées, et tout particulièrement des bovins d’ouvrage en tous pays. Il en est résulté plusieurs articles ou fascicules répondant à des demandes précises :

            « Permanence et variations, ou la génétique vue par un homme de terrain » (signalé par J.J. Lauvergne et R. Laurans dans leur bibliographie signalétique, 1961-1979)

            « Des vaches Ferrandaises, pour quoi faire ? »

            « Chars et boeufs de la préhistoire saharienne »

            « Virabio » (encouragé par F. SIGAUT, alors secrétaire de l’A.F.M.A.) et deux fascicules écrits à l’usage de nouveaux bouviers-charretiers-laboureurs d’Afrique (équipe Projet d’Action Educative Togo, de Quimper).

Plusieurs articles, non incorporés dans cet ouvrage, sont centrés sur les attelages bovins exceptionnels à grands effectifs, attelages attestés par des récits de voyages, des photos ou des films.

 

            La fuite des ans.

 

            Le temps a des conséquences irréversibles. C’est pourquoi Jean CUISENIER lançait dans son éditorial de juin 1984, cet avertissement : « Si d’autres bouviers ne viennent pas parler d’eux-mêmes, recueillons au moins les traces visibles et sonores de leurs pratiques ». (in Bulletin de l’A.F.M.A.)

            Je me suis alors rendu compte qu’il y avait mieux à faire. J’ai voulu dégager, comparer, creuser, expliquer des faits tangibles, le plus souvent ignorés. Ainsi en est-il de « six caractéristiques importantes des jougs de tête » (page 60). Importantes pour l’action mécanique du moteur vivant ; pour la liberté d’esprit du bouvier ; pour l’ethnologue qui veut dépasser les routines, les apparences, les préjugés…

            Comparativement à l’étude précitée, les éléments d’un lexique » (page 121) – sous la direction de Mr J.M. DUPLAN – ont été une tâche bien plus aisée et agréable à réaliser. D’autres mots occitans survivent, plus ou moins altérés, en Bourbonnais par exemple.

           

            Se comprendre.

 

            Sous le titre « les bovins enjougués découverts par l’image » (page 146), le dernier quart de l’ouvrage constitue une initiation directe à une langue étrangère. Il se veut accessible à un public non averti. J’ai envisagé un emploi possible de cette cinquantaine de pages sous forme d’affichage, dans un musée ou une exposition. Il faut que « ça saute aux yeux ». L’avantage pédagogique des silhouettes, c’est qu’elles éveillent l’active et sympathique attention des visiteurs. En effet, les bovins traditionnels ou exotiques sont devenus totalement étrangers à la population urbaine et souvent même aux gens de la terre.

 

            Découvrir.

 

            L’espèce bovine domestiquée a été mêlée à toutes sortes d’agricultures, de techniques, de migrations, de religions, depuis des époques très éloignées où la forêt feuillue, ou même la forêt-galerie, jouaient un rôle modérateur et nourricier, souvent favorable à la vache. Et ceci aussi bien en Inde qu’en Afrique, en Hongrie qu’en Scandinavie.

            Plus près de nos préoccupations, mon voeu constant peut se résumer ainsi : voir un jour des chercheurs qualifiés tirer parti de ma longue quête. Si les disciplines scientifiques sont parfois rivales ou pointilleuses, nous somme tous, finalement, solidaires dans la recherche du vrai ».

 

                                                                                                          F.J., février 1990

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Elvire aux rencontres de bouviers en Alsace chez Philippe Kuhlmann à Soultzeren en 2015 sur les pas de son grand-père

Fabrication de « Frindes », filet vire-mouches pour les bovins d’attelage en Bresse, Curciat-Dongalon (01)

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L’utilisation du joug de cornes pour l’attelage des bovins bride les mouvements de tête des animaux. Ceux-ci, en période estivale, ne peuvent donc pas remuer la tête pour chasser les mouches qui les importunent en particulier aux yeux. La situation peut mettre les animaux dans un état d’énervement qui ne contribue pas à un travail efficace et serein.

L’utilisation de « filets » en frange de cuir ou textile, pendus à la tête des animaux permet de palier à ce problème.

Nous avons été collecter en 2018 Monsieur Robert Canard, l’une des dernières personnes qui connaît la technique traditionnelle de fabrication de « frindes » en chanvre textile, un modèle typique de filet vire-mouches réalisé à proximité de Curciat-Dongalon en Bresse (01).

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Laurent Janaudy avec sa paire de vache Aubrac équipées de frindes (2010)

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Etoupe de chanvre textile

Hormis l’apprentissage en direct et la pratique avec les informateurs, la vidéo est la meilleure des solutions pour transmettre un geste, un savoir-faire.

Réalisation en vidéo:

Partie 1

Partie 2

Cette fabrication a la particularité d’être réalisée en toronnant à deux brins les fibres de chanvre à partir des fibres brutes légèrement peignées et en réalisant en même temps le tressage des frindes.

Cette technique qui transforme directement de la fibre brute en un objet fini et fonctionnelle est difficilement compréhensible si on ne la voit pas se réaliser du début à la fin. Ce type de réalisation de toronnage/tressage simultané, est l’une des premières techniques « textile » utilisée par l’homme dès la préhistoire.

 schéma toronnage

La réalisation:

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1.Première boucle.

Un brin long est d’abord réalisé puis est bouclé à une extrémité.

La boucle va servir à tenir les torons suivants qui vont être réalisés pour former les franges pendantes du vire-mouche. Le brin long de cette boucle sera un des deux liens qui tiendra le vire-mouche sur la tête des bêtes.

2. Premiers brins longs.

Ensuite on monte des brins longs sur la boucle du premier brin. 

Après la pose du premier brin sur la boucle, les brins suivants sont mariés en une trame autour des brins réalisés précédemment, formant ainsi une bande tressée en haut de la pièce, avec les brins libres et pendants en dessous d’une longueur de trente trois centimètres, faisant leur office de vire-mouches.

Monsieur Canard dispose ordinairement dix brins sur la boucle initiale

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Début de Frinde en raphia de couleur pour voir comment s’organisent les brins pendants. Il n’y a ici que neuf brins mis en place

3. Montage de brins longs pour obtenir la longueur souhaitée.

Lorsque les dix brins sont tous en place sur la boucle de départ, la longueur de la frinde n’est pas suffisante. Pour continuer à créer des brins pendants et donc augmenter la longueur, au lieu de partir de la boucle de départ, on repart à tresser à partir du premier brin pendant (brin numéro 1 sur la photo ci dessus) et on tresse jusqu’à obtenir au bout, un nouveau brin pendant.

Puis on repart du second brin pendant, et ainsi de suite, en décalant d’un brin à chaque fois, jusqu’à obtenir une bande en haut de soixante centimètres de long.

Le dernier brin long réalisé sera l’un des deux brins qui servira à faire la boucle finale et le brin long de fixation sur les bêtes. Il n’est donc pas nécessaire de le faire aussi long en bout (juste de quoi former la moitié de la boucle finale).

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4.La finition.

La bande supérieure a alors un vide en son bout, de la forme d’un triangle. Il faut donc combler le triangle dessiné pour obtenir une bande supérieure de la forme d’un rectangle, en tressant au départ du dernier brin pendant réalisé. On réalise des aller-retour en décalant à chaque fois, en bas, d’un départ de brin.

5. La boucle finale.

On réalise pour finir avec l’extrémité du toron de remplissage, une boucle à l’inverse de la première boucle de montage, en la mariant avec le dernier brin pendant réalisé.

Une fois mariés, ces deux brins n’en forment plus qu’un seul,  qui fera office du second brin d’attache sur la tête des bovins.

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Robert Canard et Véronique Nioulou en apprentissage

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Frinde complète réalisée par Robert Canard

Vous pouvez aussi nous contacter sur l’adresse du blog pour des compléments d’informations.

Merci à Monsieur Robert Canard pour nous avoir transmis ce savoir-faire. Sa gentillesse et son humour nous ont fait passer une journée des plus agréables.

Merci à Monsieur et Madame Gérard et Colette Basset pour leur accueil, leur gentillesse et pour avoir permis la rencontre avec Monsieur Canard.

Véronique et Michel Nioulou

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Livre de jacques Laporte sur Renée Bagelet, l’attelage des vaches et sa vie de paysanne

 

Jacques Laporte présente son livre et sa démarche:

« Photographe naturaliste et humaniste, passionné des hommes et de leurs traditions, j’ai suivi pendant quinze ans la vie de Renée Bagelet, afin d’immortaliser dans un ouvrage, le dur labeur d’une agriculture « Paysanne » au plus près de la terre et des bêtes.Renée a travaillé ainsi jusqu’en 2010……Ce n’était pas du folklore!!!!! »

Pour commander le livre de Jacques Laporte Cliquez ici et ici.

 

Consultez le blog de l’occitan en cliquant ici

Renée Bagelet, femme authentique

A bientôt 86 ans, Renée Bagelet ne perd pas le nord. Lucide, et très active, même si depuis 5 ans elle n’amène plus ses bœufs dans les champs pour labourer, charger du foin ou sortir du bois… Mais n’allez pas croire qu’elle reste assise sur sa chaise, al canton. Renée, c’est une vedette. Les visites se succèdent : des curieux qui l’ont vue dans un film, impatients de la découvrir… Des habitués qui ne peuvent pas se résoudre à ne plus prendre de nouvelles. Plusieurs films sont sortis sur elle dont celui d’Amic Bedel et Jack Levé « Las 4 sasons de la Renada » en V Òc. Jacques Laporte, un photographe qui la suit depuis 15 ans va sortir un livre d’ici quelques jours. Renée, sous les projecteurs mais nous ne sommes pas au spectacle. Une femme authentique qui se fiche pas mal du qu’en-dira-t-on.

Photo Jacques Laporte

Photo Jacques Laporte

Una mirgueta per las polas

Elle a le sens de la formule; des piques aussi. Mais elle sait également être dame de coeur. C’était ma première rencontre avec cette légende. J’en ai vu d’autres, mais me voilà un peu sur ma réserve. Jacques Laporte le photographe nous attend. Il l’a prévenue. Mais elle a déjà oublié. On ne va pas s’embarrasser avec les présentations. La Renada sap pas ont se virar. Oc-ben! Quitament a 85 ans ! Pas besoin de lui demander de faire quelque chose. Elle fera ce qu’elle voudra, comme elle entend, au moment choisi. Un brin résistant, un zeste cabot. Elle observe, écoute mon occitan : « es pas lo mème que lo meu mas parlas melhor que l’autre que venguèt ». Me damne, un compliment ! C’est Jacques qui va prendre : « Aquel li comprend pas res. Parla francés. Li vos cal explicar ». Elle « rondine » un peu mais se prête au jeu : « sabiái sachut, auriái metut un polit capèl. N’ai un trentenat! ». Mais pas de temps à perdre. Il faut aller nourrir les poules… avec une souris qu’elle a attrapée ! Dans la grange, Blanchette et surtout Pétassou ne sont plus là : « Es mòrta aquí, dabant ieu, de vielhum ». Depuis 5 ans, elle ne travaille plus les champs avec son parelh de buòus dondats. Fini les labours, les moissons, le foin, rentrer le bois, faire la vigne. Tot aquò ambe los buòus…e de bravas susadas ! Mais la grange n’est pas vide pour autant. Jacques Laporte lui demande de travailler. Elle fait la litière des 5 vaches. Jack Levé qui avait fait les images du film d’Amic Bedel est revenu pour s’y frotter. Mais c’est son manteau qui ressort, orné de paille. Prétexte ou pas, Renée a l’œil et se fait un plaisir de le brosser. Un tantinet séductrice.

Photo Jacques Laporte

Photo Jacques Laporte

Jacques lo pastissièr

Ca fait plus de 15 ans que Jacques laisse ses éclairs. Il a flashé sur la Renée. Pâtissier de métier, sortir des murs pour mettre en boîte la nature, les savoirs-faire qui se perdent, ceux qui les font encore. Une photographe humaniste tel qu’il se définit. Un ami lui a parlé de Renée. « Je suis des années 50 et j’ai connu ce monde paysan en pleine mutation. Aujourd’hui on veut refaire du folklore. Mais Renée c’est de l’authentique ». Renée, il faut savoir l’apprivoiser. Alors Jacques lui amène des gâteaux. « Les photos c’est joli. Mais les gâteaux c’est bien meilleur ! » Alors lo pastissièr comme elle l’appelle a gagné sa confiance. Mais pas totale : « Vous avez intérêt à me donner un livre quand il sortira ! » Jacques préfère en rire. Elle semble satisfaite des photos du livre. Mais sa coquetterie en pâtit. « J’ai les cheveux frisés comme une queue de rat. Et là, mais je suis grosse comme une barrique !  » Mais se rassure de suite : « Là j’étais plus jeune, j’aurais pu encore me remarier ». Son premier mari : « l’ai fotut a la pòrta » !

Photo Jacques Laporte

Photo Jacques Laporte

Lo regent que quirda

Vient le moment de l’interview. De cette vie riche faite d’authenticité de durs labeurs, tout lui semble normal. « Que volètz que vos digue? Era coma aquò. » Bien sûr, elle égraine ses histoires, son histoire, avec la même saveur, ce certificat d’études loupé pour un exercice de calcul mental. « I comprenguèri pas res, mè alèra res de tot ! E lo regent me fotèt una engulada, quirdava talament, entendi enquèra que quirda! » Un sens inné de la formule, magnifié par une théâtralité très probante. D’ailleurs elle a longtemps brûlé les planches. Sa vie de regenta aurait été plus calme mais certainement plus banale et moins médiatique. Car Renée n’en finit plus d’être connue et reconnue. « N’i a que son jaloses. Tè, enquèra la Renée que passa al cinema. Que vòl enquèra ? … M’en foti, los emmèrdi ! » Pas facile, sans concession mais attachante. Elle ne dit rien de ce qu’on attend mais se raconte à sa manière. Elle a l’allumage facile mais c’est sans doute une marque de gratitude. De toute façon c’est comme ça. E se siás pas content, vira te lo cuol al vent !

En quittant la Renada, je lui fait le poutou. Oui, vraiment, dans ce monde d’uniformité et de conventions, l’authenticité de La Renada détonne. Elle tonnera et trônera longtemps dans ma mémoire.

Lo Benaset @Benoit1Roux

Plus d’informations sur ce livre qui fait appel au financement participatif :

https://fr.ulule.com/femme-paysanne/description/

Renée Bagelet et ses bœufs Photo : Jacques Laporte

Photo : Jacques Laporte

Vidéo d’attelages bovins anciens en Auvergne

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