
L’utilisation du joug de cornes pour l’attelage des bovins bride les mouvements de tête des animaux. Ceux-ci, en période estivale, ne peuvent donc pas remuer la tête pour chasser les mouches qui les importunent en particulier aux yeux. La situation peut mettre les animaux dans un état d’énervement qui ne contribue pas à un travail efficace et serein.
L’utilisation de « filets » en frange de cuir ou textile, pendus à la tête des animaux permet de palier à ce problème.
Nous avons été collecter en 2018 Monsieur Robert Canard, l’une des dernières personnes qui connaît la technique traditionnelle de fabrication de « frindes » en chanvre textile, un modèle typique de filet vire-mouches réalisé à proximité de Curciat-Dongalon en Bresse (01).

Laurent Janaudy avec sa paire de vache Aubrac équipées de frindes (2010)

Etoupe de chanvre textile
Hormis l’apprentissage en direct et la pratique avec les informateurs, la vidéo est la meilleure des solutions pour transmettre un geste, un savoir-faire.
Réalisation en vidéo:
Partie 1
Partie 2
Cette fabrication a la particularité d’être réalisée en toronnant à deux brins les fibres de chanvre à partir des fibres brutes légèrement peignées et en réalisant en même temps le tressage des frindes.
Cette technique qui transforme directement de la fibre brute en un objet fini et fonctionnelle est difficilement compréhensible si on ne la voit pas se réaliser du début à la fin. Ce type de réalisation de toronnage/tressage simultané, est l’une des premières techniques « textile » utilisée par l’homme dès la préhistoire.

La réalisation:

1.Première boucle.
Un brin long est d’abord réalisé puis est bouclé à une extrémité.
La boucle va servir à tenir les torons suivants qui vont être réalisés pour former les franges pendantes du vire-mouche. Le brin long de cette boucle sera un des deux liens qui tiendra le vire-mouche sur la tête des bêtes.
2. Premiers brins longs.
Ensuite on monte des brins longs sur la boucle du premier brin.
Après la pose du premier brin sur la boucle, les brins suivants sont mariés en une trame autour des brins réalisés précédemment, formant ainsi une bande tressée en haut de la pièce, avec les brins libres et pendants en dessous d’une longueur de trente trois centimètres, faisant leur office de vire-mouches.
Monsieur Canard dispose ordinairement dix brins sur la boucle initiale

Début de Frinde en raphia de couleur pour voir comment s’organisent les brins pendants. Il n’y a ici que neuf brins mis en place
3. Montage de brins longs pour obtenir la longueur souhaitée.
Lorsque les dix brins sont tous en place sur la boucle de départ, la longueur de la frinde n’est pas suffisante. Pour continuer à créer des brins pendants et donc augmenter la longueur, au lieu de partir de la boucle de départ, on repart à tresser à partir du premier brin pendant (brin numéro 1 sur la photo ci dessus) et on tresse jusqu’à obtenir au bout, un nouveau brin pendant.
Puis on repart du second brin pendant, et ainsi de suite, en décalant d’un brin à chaque fois, jusqu’à obtenir une bande en haut de soixante centimètres de long.
Le dernier brin long réalisé sera l’un des deux brins qui servira à faire la boucle finale et le brin long de fixation sur les bêtes. Il n’est donc pas nécessaire de le faire aussi long en bout (juste de quoi former la moitié de la boucle finale).

4.La finition.
La bande supérieure a alors un vide en son bout, de la forme d’un triangle. Il faut donc combler le triangle dessiné pour obtenir une bande supérieure de la forme d’un rectangle, en tressant au départ du dernier brin pendant réalisé. On réalise des aller-retour en décalant à chaque fois, en bas, d’un départ de brin.
5. La boucle finale.
On réalise pour finir avec l’extrémité du toron de remplissage, une boucle à l’inverse de la première boucle de montage, en la mariant avec le dernier brin pendant réalisé.
Une fois mariés, ces deux brins n’en forment plus qu’un seul, qui fera office du second brin d’attache sur la tête des bovins.




Robert Canard et Véronique Nioulou en apprentissage

Frinde complète réalisée par Robert Canard
Vous pouvez aussi nous contacter sur l’adresse du blog pour des compléments d’informations.
Merci à Monsieur Robert Canard pour nous avoir transmis ce savoir-faire. Sa gentillesse et son humour nous ont fait passer une journée des plus agréables.
Merci à Monsieur et Madame Gérard et Colette Basset pour leur accueil, leur gentillesse et pour avoir permis la rencontre avec Monsieur Canard.
Véronique et Michel Nioulou
