1 5 6 7 9

Etude sur la traction bovine, ADEME Limousin, Mai 2013

phku13

Philippe Kuhlmann

L’ADEME en Limousin (cliquez ici pour voir) intervient sur tout le territoire régional et décline son action en partenariat avec le Conseil Régional et les Conseils Généraux.

Son soutien vise à favoriser particulièrement les démarches des exploitants agricoles répondant aux défis actuels en matière de lutte contre le changement climatique et de prévention des déchets notamment.

Elle a fait réaliser en 2013 une étude par le FR CIVAM Limousin, pour établir un argumentaire énergétique, économique et environnemental, sur la traction bovine dans les activités agricoles françaises.

Nous avions été contactés par la réalisatrice de l’étude, Betty Marin, pour l’orienter dans ses recherches.

L’étude comporte trois volets:

  – 1: Synthèse des études existantes sur la traction bovine

  – 2: Recommandations sur la prise en main des animaux

  – 3: Proposition d’une comparaison chiffrée

Cliquez sur le lien suivant pour voir le rapport:

fichier pdf  adem limousin rapport_Traction_Animale_FRCivam_Mai_2013

Attention deux erreurs se sont glissées dans l’étude (précisions apportées par Solène Gaudin et Emmanuel Fleurentdidier): 

1- concernant les données sur la fenaison au tracteur, il faut lire  « /jour » au lieu de « / heure » ( 2 ha/jour)

2- pour la reprise de labour, il faut lire « / jour » au lieu de « /heure » (0,5 ha/jour).

 

OLYMPUS DIGITAL CAMERA

Philippe Kuhlmann lors de la journée technique chez lui à l’occasion des rencontres de bouviers à L’Ecomusée d’Alsace (Photo André Kammerer).

phku15

homesteader 2ok

Photo Solène Gaudin

La ferrure du boeuf, Emile Thierry, 1904, Journal d’agriculture pratique, Tome 1

Merci à Laurent Avon de nous avoir communiqué ce document de 1904 extrait du « Journal d’Agriculture Pratique » consacré la ferrure des boeufs.

Téléchargez le PDFfichier pdfen cliquant ici.

 

Ferrure du boeuf 1 ok

Ferrure du boeuf 2 ok

Ferrure du boeuf 3 ok

« Revue d’Ethnozootechnie » et les boeufs de travail

La « Revue d’Ethnozootechnie », Patrimoines et Savoirs en Elevage, propose deux numéros consacrés aux bovins de travail

N°60 – Les boeufs au travail

Paru le 17/10/1997 
144 pages 

Sommaire

(144 pages) 
J.M. DUPLAN : Introduction – F. RINIERI-VILLAIN : Attelages de la vallée des Merveilles – F. SIDI MAMMAR : Le statut des boeufs dans les Alpes valaisiennes (Suisse). Réflexions anthropologiques à propos de la castration – M. PRIVAL : Le débardage à traction bovine dans les Bois Noirs (Puy de Dôme) – E. MONPIED : Les boeufs au travail : noms et nombre – L. REVELEAU : Les bovins de travail en Vendée du 19ème siècle aux années 50 – C. HONGROIS : Jouques de Vendée – F. SPINDLER : La répartition géographique en France des bovins utilisés pour la traction et son évolution jusqu’à la dernière guerre – E. MEININGER : Les bovins laboureurs à Cotacachi (Andes septentrionnales de l’Equateur) – F. VERSINI : De la compétition des boeufs-tirants et des charretiers en Guadeloupe – C. GRIFFIN-KREMER : Pourquoi et comment tourner à droite ? Labourer deisal avec des Boeufs – M. BARBOF : Jougs sculptés du Minho et du Douro littoral – E. VALL : La traction bovine en Afrique centrale soudano-sahélienne (Cameroun, Tchad et Centrafrique). 
HOMMAGE A FRANCOIS JUSTON 
N. BOCHET : Présentation des nouvelles contributions – F. JUSTON :A la recherche des attelages bovins à grand effectif. Réflexions d’un bouvier de France sur la Carrese de San Martino. Talents, tournage et poudre aux yeux – M. DES COLOMBIERS : Note sur le meilleur mode d’attelage des boeufs et des vaches (Reproduction d’une publication de 1841). Commentaires de F. JUSTON.

N°32 – Les bovins

Paru le 24/03/1983 
202 pages 

Ce document est aussi consultable directement sur le net en cliquant ici

Sommaire

(202 pages) 
J. M. DUPLAN : Présentation – F. POPLIN : Paléontologie des bovinae et origine des bovins domestiques – A. MUZZOLINI : La préhistoire du boeuf dans le nord de l’Afrique durant l’holocène – L. BODSON : Aperçu de l’élevage bovin dans l’Antiquité – J. M. DUPLAN : Le vocabulaire de l’élevage bovin dans les langues indo-européennes – J. J. LAUVERGNE : Les robes des bovins domestiques et leur formule génétique – C. MECHIN : Ethnologie d’une société forestière : le boeuf d’attelage dans la vallée de la Plaine (Vosges) – R. LAURANS : Les bovins et les transports routiers – N. BOCHET : Le comportement des bovins, savoirs traditionnels et acquis scientifiques – B. DENIS : Parenté et filiation des races bovines françaises actuelles vues par les auteurs anciens – M. THERET : L’introduction des races bovines britanniques dans le cheptel bovin français et ses conséquences – L. AVON : La conservation des ressources génétiques bovines en France : les causes d’amoindrissement – J. BOUGLER : Organisation actuelle des races bovines françaises – J. M. DUPLAN : Interventions et compléments.

Le débardage dans les bois noirs (Puy de Dôme), par Marc Prival

Article de Marc Prival, extrait de la Revue d’Ethnozootechnie n°60 « Les boeufs au travail » du 17/10/1997, parmi de nombreux autres articles sur le sujet.

Merci à Laurent Avon pour sa communication.

Cliquez ici  pour se procurer le numéro complet consacré aux boeufs de travail.

fichier pdf Cliquez ici pour voir l’article en PDF

prival le débardage dans les bois noirs 1 ok

prival le débardage dans les bois noirs 2 ok

prival le débardage dans les bois noirs 3 ok

prival le débardage dans les bois noirs 4 ok

prival le débardage dans les bois noirs 5 ok

prival le débardage dans les bois noirs 6 ok

prival le débardage dans les bois noirs 7 ok

prival le débardage dans les bois noirs 8 ok

« Les vaches de François », article d’Eric Rousseaux à propos de François Ladet (12)

eric rousseaux F01 ok

Sur une petite route, aux environs de Saint Eulalie d’Olt, dans l’Aveyron…

Texte et photos Eric Rousseaux Paru dans la revue « Sabots » numéro 17, mars / avril 2007.

__________________________________________________________________

Les vaches de François.

Souvent présents lors des moissons à l’ancienne et autres fêtes traditionnelles, les attelages de bœufs et leurs conducteurs enchantent généralement le public. Imaginez alors le bonheur qui vous attend si un jour vous avez la chance d’entrer dans l’intimité de l’un de ces passeurs de mémoire !

Au détour d’une petite route.
Nous en avions pourtant vu, des vaches Aubrac sur les petites routes de l’Aveyron au cours des jours précédents ! Nous venions d’assister à la transhumance qui anime chaque année les Monts d’Aubrac au retour du printemps. Nous aurions dû en être rassasiés…

Ces deux là avaient cependant quelque chose de plus. Telles deux sœurs siamoises, solidarisées par le joug placé sur leur nuque et lié à leurs cornes, elles suivaient docilement un homme marchant devant elles, l’aiguillon posé sur une épaule, la fourche sur l’autre.
Le temps de trouver un emplacement pour se garer, quelques virages plus loin, tout le monde avait disparu. Avec le chant des oiseaux pour seule compagnie, nous marchions, mon épouse et moi-même, à la recherche de cet équipage. Il était forcément dans les parages !
Et puis enfin, un indice : des andains de foin à flanc de coteau… Ce devait être là !
Suants, soufflants, nous avons fini par retrouver « nos vaches » au sommet d’une colline. L’homme était en train de les atteler à une remorque maintes fois rafistolée, comme en témoignaient les composants hétéroclites de sa structure. Après avoir échangé quelques civilités, nous l’avons accompagné et regardé travailler.

eric rousseaux F02 ok

eric rousseaux F03 ok

Maintes fois rafistolée…

Essentiellement utilisée pour la production extensive d’animaux de boucherie, et de façon plus marginale, pour la production de lait destiné à la fabrication du fromage de Laguiole, la race Aubrac a longtemps été employée comme bête de trait, spécialement pour les travaux de la ferme, les moissons, le transport du foin et des céréales, mais aussi pour le débardage.
Une paire de bêtes comme celles que nous avions devant nous peut tirer une tonne à la vitesse de 4 kilomètres par heure en travaillant 8 heures par jour et 250 jours par an. Ces animaux, agiles, calmes et appliqués, commencent à travailler à l’âge de 30 mois, ils pèsent en moyenne 700 kg.

eric rousseaux F04 ok

eric rousseaux F05 ok

Après avoir été coupé avec une moto faucheuse, le foin a été fané puis andainé avec un râteau faneur tracté par les vaches.

Un homme heureux.
Tout en chargeant son foin, François Ladet, c’est le nom de notre homme, nous résuma sa vie en quelques mots. Aujourd’hui âgé de 67 ans, il avait logiquement succédé à son père sur la petite exploitation familiale, à Sainte Eulalie d’Olt (un des plus beaux villages de France), tandis que ses 5 sœurs quittaient la ferme. L’exploitation comptait alors 40 brebis, 24 vaches et 2 bœufs attelés. Cela suffisait à faire vivre la famille. En hiver, cependant, le père de François débardait avec ses bœufs pour le compte d’une scierie des environs.

eric rousseaux F06 ok

Le joug frontal est maintenu par une lanière de cuir d’abord enroulée autour du joug et de la corne externe, puis sous les cornes, autour du joug et du front sur lequel on a placé un coussin, puis autour du joug et de la corne interne. La lanière est enfin amarrée à un tenon placé à l’extrémité du joug.

François (qui n’avait jamais utilisé un tracteur, précisa-t-il), nous expliqua ensuite comment, chaque année, il dressait un bœuf à l’attelage. Il avait même fait réaliser un joug triple par le menuisier du village. Ce joug, d’un modèle peu commun, était destiné à recevoir un élève que le meneur plaçait entre 2 bœufs expérimentés.

eric rousseaux F07 ok

eric rousseaux F08 ok

Un peu d’exercice !

On comprenait bien à l’entendre, que son existence n’avait pas toujours été une partie de plaisir, « j’ai vu de la misère toute ma vie ! ». Mais il semblait que cela soit dit sans amertume, juste pour en faire le constat.

eric rousseaux F09 ok

Là, pour les animaux, il ne s’agit plus de tirer, mais de retenir la voiture, une manoeuvre qui suppose une certaine expérience du travail en montagne…

Enfin, après avoir hissé une dernière fourche de foin en haut de son chargement, le visage illuminé d’un large sourire, François nous avoua qu’il avait maintenant une compagne, du même âge que lui, qui lavait son linge, lui faisait à manger… et que s’en était fini pour lui de vivre « seul comme une bête ».

eric rousseaux F10 ok

Retour à la ferme où ce foin d’excellente qualité sera entreposé pour l’hiver.

____________________________________________________________

Merci à Eric Rousseau pour nous avoir si gentiment communiqué son article.

Plans du travail à ferrer les boeufs de la maison Dubuisson, à Saint-Bonnet-de-Joux (71)

travail dubuisson 2 ok

Toutes photos Joanny Nioulou

Peu de travails à ferrer restent en place en Charollais et en Brionnais, deux régions d’élevage de Saône-et-Loire, où les attelages bovins furent légion.

Celui de la forge Dubuisson, maréchal-ferrant à Saint-Bonnet-de-Joux, trône dans la cour de la forge, au bourg depuis des décennies. Il a servi, voici encore peu d’années, au parage et/ou au ferrage orthopédique de bovins des alentours.

Ce doit être l’un des derniers, sinon le dernier de la région.

travail dubuisson photo famille 19 ok

Photo de famille Dubuisson (merci à André Dubuisson)

Il reste une pièce unique d’un patrimoine du Charollais-Brionnais, où les attelages de bovins sont restés très majoritaires jusqu’entre les deux guerres et ont perduré jusque dans les années 1960.

Les toutes dernières paires, à Bois-Sainte-Marie (canton de la Clayette), ont travaillé jusqu’au début des années 1980.

Ce travail à ferrer mérite une préservation au vu de sa rareté et de l’importance qu’ont eu les attelages de bovins dans l’histoire de la région.

Voici les plans et des photos de ce travail. (cliquez sur les photos pour les agrandir)

plan 2 ok ok

plan 3 ok ok

plan 1 ok ok

Vous pouvez télécharger les plans papiers pour les imprimer, si vous le souhaitez.fichier pdf en cliquant ici.

Le travail est couvert et reste donc en bon état. Seules, les sangles de levage ne sont plus présentes en place. 

travail dubuisson 1 ok

travail dubuisson 4 ok

travail dubuisson 6 ok

travail dubuisson 9 ok

travail dubuisson 7 ok

travail dubuisson 8 ok

travail dubuisson 12 ok

travail dubuisson 13 ok

travail dubuisson 3 ok

travail dubuisson 15 ok

travail dubuisson 16 ok

travail dubuisson 11 ok

travail dubuisson 17 ok

travail dubuisson 18 ok

Merci à la famille Dubuisson et à Michel Bouillot pour leur collaboration et leur aide.

La tradition des vendanges, extrait

Retrouver avec délectation, l’ambiance de la fête des vendanges à l’ancienne !

Chaque année, dans le village de Lécussan au coeur des Pyrénées, voisins et amis partagent le plaisir de vendanger à l’ancienne.

Tout commence par la taille de la vigne au sécateur pour lui donner de la vigueur et la débarrasser des sarments qui serviront pour les grillades. Puis vient l’époque des labours avec les boeufs qui tirent la charrue et l’antique décavaillonneuse pour déchausser la vigne suivie d’un traitement préventif contre le mildiou, l’oïdium et autres maladies à l’aide de la fameuse pompe à dos pour sulfater ou soufrer.

Fin septembre, vient le temps des vendanges avec le tombereau qui amène le « cuvier » dans lequel les vendangeurs versent les raisins fraîchement cueillis. Lorsque le cuvier est plein son contenu est versé dans un tonneau ou le raisin sera écrasé dans un fouloir à main d’époque. Le tout se passe dans la bonne humeur. Un repas ponctue ce jour de vendanges dans une ambiance de fête avec bien sûr de la musique et des chanteurs pyrénéens.

Après 10 jours de fermentation : c’est le « soutirage » du tonneau à l’aide d’un seau en zinc pour mettre le vin en barrique et puis l’on presse la vendange à l’aide d’un presse clic/clac manuelle (datant du début du siècle dernier) pour en retirer les derniers hectolitres qui restent.

La dernière étape est la transformation d’un partie du vin en eau de vie chez un authentique bouilleur de cru qui déploie tout son savoir faire dans son « antre » remplie d’alambics, de robinets et autres instruments d’un autre âge.

Une vidéo sur l’une des plus nobles traditions : le travail de la vigne à consommer sans modération.

Il était une fois les labours (extrait)

 

De « l’antique » araire aux ensembles guidés par satellite

Un siècle d’histoire des labours, de « l’antique » araire aux ensembles guidés par satellite, en passant par la fabuleuse époque des vieux tracteurs !

Toutes les étapes marquantes des avancées technologiques majeures racontées par des experts passionnés :

# L’araire traînée par de superbes attelages de chevaux ou de boeufs.
# Le charron et sa forge redressant socs et charrues à l’ancienne.
# Le bouvier conduisant son équipage.
# L’arrivée de l’imposante machine à vapeur et sa charrue à socs.

Un formidable travail de recherche pour vous faire redécouvrir les différents et surprenants systèmes inventés par les constructeurs les plus ingénieux :

# La charrue à disque
# L’étonnante piocheuse, qui essayait de reproduire mécaniquement le mouvement humain.
# L’adaptation des charrues d’antan à la traction mécanique, avec les tracteurs d’époque.
# La charrue alternative
# L’ensemble Mac Cormick, qui marqua l’histoire du labour au XXème siècle.
# La révolution amenée par Ferguson : l’invention du système de relevage 3 points.

Et pour finir, une démonstration du Massey Ferguson 17 socs, recordman du monde et la finale du concours national de labours avec les meilleurs laboureurs de France !

Dictionnaire des sciences animales du Cirad

Le Cirad (cliquez ici pour voir) est un centre de recherche français qui répond, avec les pays du Sud, aux enjeux internationaux de l’agriculture et du développement.

En partenariat avec les pays du Sud dans leur diversité, le Cirad produit et transmet de nouvelles connaissances, pour accompagner leur développement agricole et contribuer au débat sur les grands enjeux mondiaux de l’agronomie.

Le Cirad met aussi en ligne un dictionnaire des sciences animales (Cliquez ici pour voir).

Elles peuvent permettre à un néophyte de s’informer facilement sur de nombreux aspects des sciences animales avec, entre autre, de nombreuses définitions en rapport avec l’attelages des bovins.

Pour exemple:

Les bœufs de Nassandres, par Etienne Petitclerc

Voici un article d’Etienne Petitclerc paru dans la revue « Sabots » numéro 38 Septembre/Octobre 2010 (cliquez ici pour voir la revue « Sabots »).

Merci à Etienne de nous avoir communiqué cet article patrimonial des plus enrichissants.

________________________________________________________________

Quatre bœufs portant des jouguets frontaux tirent un chariot betteravier aux environs de Bernay dans l’Eure. Une rapide enquête bibliographique nous faisait rapprocher ce curieux équipage – pour la région – de la sucrerie-distillerie de Nassandres, à une encablure de là. Une autre photographie et les extraits d’une monographie sur l’établissement nous livrent un nouvel éclairage…

Dans la vallée de Serquigny, le labour profond des terres betteravières exige un attelage puissant. Six bœufs de race Salers sont nécessaires sur la charrue brabant réversible. Le cliché est localisé et l’appartenance à l’exploitation est attestée.

Portons notre attention sur la technique tout à fait particulière d’attelage et de conduite des attelages au jouguet.

François Juston, qui évoqua laconiquement les attelages de Nassandres dans son fameux ouvrage « Quand la corne arrachait tout » (1), justifiait cette pratique par la liberté de mouvement donnée à chaque animal et, de là, la souplesse conférée à l’attelage. Il avançait aussi l’avantage indéniable de pouvoir faire indistinctement tracter matériels et véhicules par des chevaux et des bovins. Si, sur le fond, cette possibilité est recevable elle n’est, ici, pas de mise. Les exploitations dépendant de la sucrerie n’utilisent que des bœufs à l’exclusion de toute attelée chevaline.

L’information est révélée par une petite monographie consacrée par Louis Duval à cette exploitation en 1900 (2). La lecture de ce texte, concis et richement illustré, contemporain des images ici présentées, s’avère d’emblée d’un rare intérêt.

645 hectares !

La culture qui dépend directement de la sucrerie comprend six fermes : Chrétienville, Les Rufflets, Bigards, Feuguerolles, Beauficel, Beaumontel. Relativement proches les unes des autres et à une distance moyenne de 4 kilomètres de la sucrerie (8 kilomètres au maximum), elles présentent toutes le caractère des fermes de Normandie.

L’usine se situe dans la vallée de la Risle mais les cultures s’étendent sur le plateau du Neubourg, compris entre les vallées de la Risle, de l’Eure et de la Seine. On rencontre là des terres d’une grande fertilité propres à la pratique d’une culture intensive. L’exploitation agricole totalise 645 hectares dont on tire deux partis. Dans les terres profondes, soit environ 473 hectares, on pratique l’assolement triennal consistant en une rotation de betteraves, de blé, d’avoine ou orge. Les terres peu profondes, converties en herbages permanents plantés de pommiers à cidre, sont consacrées à l’élevage et à l’alimentation d’un troupeau de vaches normandes du Cotentin qui fournissent du lait et du beurre (cette partie de l’activité porte sur 244 animaux : 87 vaches, 70 génisses, 40 génisses pleines et jeunes bœufs, 37 veaux et 10 taureaux).

Les engrais sont largement employés à Nassandres. On met le fumier à la dose de 35.000 à 40.000 kg par hectare pour trois ans ; épandu à la fourche aussitôt que les fumerons ont été disposés dans les champs, on l’enfouit par un labour léger (entre fin août et novembre).

Une large place est également faite aux engrais chimiques. Les betteraves reçoivent l’acide phosphorique sous forme de superphosphates et de phosphates, et l’azote sous forme de nitrate de soude, sulfate d’ammoniaque, chairs ou sang desséchés.

Tous ces engrais sont appliqués pour trois ans en tête de l’assolement, les cultures ultérieures de céréales ne reçoivent pas, sauf exception, d’engrais nouveau.

Machines et mécaniques

Pour la mise en valeur de toutes ces terres, on recourt à un matériel agricole considérable et très complet. Les labours se donnent au moyen de brabants dont les dimensions varient suivant le travail, depuis les grosses charrues pour les défoncements à 0m40 ou 0m50 jusqu’aux bi-socs qui servent au déchaumage.

Des herses en fer dites couleuvres « Bajac », des herses « Howard » en zigzag, des écroûteuses-émotteuses complètent le travail des charrues, suivent le passage de l’extirpateur ou du scarificateur aussitôt après l’enlèvement des céréales.

Toutes les cultures sont semées en ligne avec des semoirs « Zimmermann ».

La récolte des céréales se fait avec des machines choisies. Les moissonneuses « Adriance » ou « Massey-Harris » sont ainsi préférées aux « Hornsby » et « Wood », robustes mais lourdes à traîner. Ces machines abattent journellement jusqu’à 4 hectares de sorte que la moisson dure environ quinze jours, pourvu que les circonstances atmosphériques s’y prêtent.

Les gerbes relevées sont mises en moyettes, à raison de trois hommes pour une machine. A dessiccation complète, on engrange une partie et on bat l’autre, dès sa rentrée des champs, pour obtenir la quantité nécessaire à la semence de l’exploitation et la vente extérieure. Le restant de la récolte est battu entre mi janvier et février/mars sous des hangars qui servent aussi au stockage de la paille.

Le battage se fait avec une machine à grand travail de construction anglaise « Clayton-Shuttlevorth » assortie d’un lieur et un compteur de gerbes. La batteuse est entraînée par une locomotive routière également de construction anglaise « Burrell and Sons » qui la remorque de ferme en ferme.

L’arrachage des betteraves commence à la mi-septembre. Il se fait aussi mécaniquement avec les appareils « Candelier » à un rang. Dans chaque pièce de terre, le débardage est réalisé au moyen de wagonnets et de voies Decauville.

Les transports s’effectuent dans de grands chariots assez semblables à ceux de Picardie. Huit proviennent de la maison Thiberge, à Courbevoie. Pouvant recevoir jusqu’à 10.000 kg, ils sont tractés, par train de trois ou quatre, des champs jusqu’à la sucrerie par une seconde locomotive routière.

Tous les autres (combien y en a-t-il ?) sont construits à l’atelier de charronnerie de la sucrerie qui effectue également toutes les réparations de même que la forge entretient tous les instruments aratoires et la mécanique de l’exploitation. Il est fait mention dans une autre étude plus tardive de l’existence d’un atelier de bourrellerie mais il existe probablement déjà en 1900.

Le cheptel

L’exploitation compte 120 à 140 bœufs de trait (il y en eu jusqu’à 150), exclusivement Nivernais et Salers. On en attelle 2 à 6 selon les labours, généralement 4 sur les chariots, 2 ou 3 de front à la moissonneuse-lieuse, 2 en file à l’arracheur de betteraves, un seul pour le binage. L’emploi du jouguet prend alors un nouveau sens, il permet de composer toutes sortes d’attelages y compris en nombre impair, de varier les « combinaisons ».

Répartis dans chaque ferme, les bœufs travaillent deux ans environ puis sont mis à l’engrais et vendus à la boucherie. Leur ration journalière se compose de pulpe (50 à 60 kg.), de menue paille (3 kg.), de sel (jusqu’à 250 gr.), de tourteau d’arachides et de colza (jusqu’à 750 gr.), d’avoine concassée (500 gr.). Pour les animaux à l’engrais cette ration est augmentée de maïs, de farine d’orge et on substitue le tourteau de lin à celui d’arachide.

Le cheptel de l’exploitation comprend aussi (depuis 1898) 400 brebis mères de race Berrichonne, un nombre assez variable de moutons à l’engrais achetés en Beauce et 8 béliers Southdown.

La porcherie de la ferme de Feuguerolles entretient 16 truies et 3 verrats de race Yorkshire provenant directement d’Angleterre. Environ 80 porcelets passent à la ferme de Bigards le temps de leur croissance, une cinquantaine est ensuite mise à l’engrais de la ferme de Chrétienville où ils reçoivent du petit lait et de la farine d’orge et de maïs.

A Chrétienville encore se trouve la vacherie. Le lait est écrémé matin et soir dans une turbine centrifuge qui traite 450 litres à l’heure. Une machine à vapeur verticale de 6 chevaux donne le mouvement à toute l’installation qui comprend, outre l’écrémeuse, une baratte et un malaxeur. Le beurre est fait tous les deux jours de façon à laisser à la crème le temps de mûrir avant d’être soumise au barattage. Il est conservé en glacières et en caves. Les bas produits de la laiterie servent à l’alimentation des jeunes veaux et des porcs ; avant de leur être distribué, le petit-lait est pasteurisé dans un appareil spécial chauffé à la vapeur.

Il faut enfin mentionner l’élève des volailles qui a principalement lieu à la ferme des Rufflets où a été construit un poulailler modèle. Deux couveuses artificielles fonctionnent sans interruption pendant la saison ; la basse-cour comprend des poules races Crève-Coeur, Faverolles et Houdan, des canards de race de Duclair, des dindons et des pintades.

Il est procédé chaque semaine à la ferme de Chrétienville, à l’abattage de quelques moutons et porcs ; la viande débitée est fournie au personnel.

Funiculaire, ponts à bascule, wagons

Comme on l’a vu plus haut, la culture (située sur le plateau) est séparée de l’usine (dans la vallée) par une côte longue et difficile. Pour économiser les attelages – en nombre, en usure et pour gagner du temps – on a installé un véritable chemin de fer funiculaire de 300 mètres. Aux deux extrémités d’un câble se trouvent deux « wagons » ou « trucs », l’un monte tandis que l’autre descend en entraînant le premier grâce à la différence de poids obtenue en remplissant d’eau une réserve. Une pompe centrifuge mue électriquement refoule dans des réservoirs l’eau nécessaire au fonctionnement de l’appareil.

Une autre amélioration d’importance a consisté à installer un système de débardage mécanique des betteraves qui arrivent par wagons depuis l’embranchement qui relie l’usine à la ligne de chemin de fer (l’usine possède ses propres trains). La Compagnie de Fives-Lille a exécuté en 1896, sur mesure, un basculeur sur vérins qui résout le problème du déchargement rapide des wagons, quelles que soient leurs formes ou leurs dimensions. Amenés sur l’appareil, calés, puis basculés sous un angle de 35°, ils sont vidés dans une trémie. Au-dessous, des wagonnets reçoivent les betteraves. Par un plan incliné sur lequel ils sont entraînés par un câble sans fin ils s’élèvent jusqu’à des passerelles établies sous des hangars qui abritent les transporteurs hydrauliques sur lesquels on forme les silos. Les wagonnets abandonnent automatiquement le câble au sommet du plan incliné, continuent à rouler grâce à une légère pente jusqu’à l’endroit voulu où un ouvrier les bascule avant de les renvoyer vers leur point de départ.

Les silos peuvent contenir jusqu’à 12.000 tonnes de betteraves qui s’y conservent dans d’excellentes conditions. L’année du rapport, on doit procéder à l’installation d’un basculeur identique destiné au déchargement des chariots.

Laissons à Louis Duval le soin de conclure :

« Tel est dans son ensemble l’exploitation de Nassandres qui comprend trois parties bien distinctes : culture, sucrerie, raffinerie, mais si intimement liées qu’elles se complètent l’une par l’autre et sont entre elles dans une étroite dépendance. Soumises à une même autorité, toujours le même esprit de suite et de méthode a présidé à toutes les entreprises, en cherchant à concilier les intérêts de la culture et les exigences d’une bonne fabrication. Grâce à un réseau téléphonique qui relie toutes les fermes entre elles et à la Sucrerie – qui est comme le centre de l’exploitation – la surveillance devient à la fois plus active et plus étroite, et l’expression d’une même volonté peut se manifester très vite et très facilement là où il est besoin de donner les instructions nécessaires d’après les informations reçues.

Enfin, si les découvertes de la science entraînent chaque jour des perfectionnements et des transformations dans l’industrie sucrière où nous sommes dans le domaine de la mécanique et de la chimie, il en est de même pour les pratiques agricoles ; le lien qui unit la science à la culture devient toujours plus étroit, et, grâce à cette féconde alliance, l’avenir témoignera de plus en plus que le beau et vaste champ d’études, au milieu duquel les agronomes vivent et contemplent les phénomènes si variés de la vie végétale et animale, offre à l’esprit un intérêt toujours nouveau, et à l’âme une de ses plus saines occupations. C’est ce qu’à Nassandres, on s’est efforcé de prouver ».

________________________________________________________________

(1)  JUSTON (F.), Quand la corne arrachait tout, Paris, Ministère de l’Agriculture et de la Pêche, 1994, 199 p.

(2)  Il s’agit probablement de Louis Duval (1840-1917), archiviste-paléographe, conservateur des musées et des Archives de la Ville de Niort, archiviste départemental de la Creuse puis de l’Orne. Chercheur émérite, historien prolixe, il demeure une référence bibliographique incontournable pour la Normandie.

 

1 5 6 7 9